Je préfère prévenir immédiatement : Je risque de ne pas pouvoir faire de MàJ de manière fréquente ou régulière, étant donné mon emploi du temps surchargé.
EDIT : Comme l'a suggéré Mat, je balise tout le prologue, puisqu'il contient des informations en rapport avec certains épisodes des saisons 10 de SG1 et 3 de SGA, en attendant un balisage par un admin (j'avais oublié de mettre SPOILER dans le titre).
EDIT 2 : A présent que la balise spoiler est en place dans le titre, je remets le prologue en lecture libre. Merci aux admins bienveillants


EDIT 3 : Prologue totalement réécrit, et publié le Dimanche 24 février 2008
EDIT 4 : Prologue une fois de plus réécrit et publié le Vendredi 23 septembre 2011 (punaise, ça en fait, du temps !)
EDIT 4 : Le Tome II est à présent en cours de publication, et couvre logiquement la suite directe des évènements décrits dans le Tome I
Prologue :
Le général Jack O’Neill avait eu l’impression, en quelques semaines, de prendre une dizaine d’années. Derrière son regard ne se cachait plus les remarques piquantes qui lui avaient fait autant d’amis que d’ennemis, mais la lassitude d’un homme qui était en train de perdre tous ses repères. Sa démarche elle-même traduisait son état d’esprit, alourdie et presqu’hésitante. Ancien membres des forces spéciales, brièvement retraité à deux reprises, les dernières années avaient redonné un sens à sa vie, tandis que la Porte, cet artefact multimillénaire, avait été la clé de tout ce qu’il était désormais. Après avoir rencontré au fil des années ceux et celles qui devinrent sa nouvelle famille, l’officier supérieur, l’homme, était devenu la somme de ses expériences, tant heureuses que malheureuses.
Cette famille, qu’il n’aurait jamais imaginée au lendemain de la mort accidentelle de son fils et du divorce que sa déréliction suicidaire avait provoqué, était aussi improbable que disparate. Daniel Jackson, le jeune archéologue qu’il avait vu et aidé à grandir, jusqu’à devenir tacitement un fils spirituel, pacifiste convaincu qui avait, accepté de défendre ses convictions, maniant désormais les armes aussi bien qu’un soldat endurci. Samantha Carter, la femme qui lui avait ôté définitivement ses dernières pulsions destructrices et avec qui il ferait sa vie, quoi que puissent dire les règlements militaires d’une planète qu’ils avaient tous deux sauvé à maintes reprises. Teal’c, un frère qui, plus que quiconque, avait été là pour le soutenir, par sa présence comme par ses rares mots, dans une décennie d’épreuves et de combats. George Hammond, un vieux soldat dont les actions, dont il savait ignorer l’étendue, avaient toujours témoigné d’une confiance et d’un respect qu’il ne pourrait jamais repayer.
Mais cette famille n’était pas restée intacte. Trop souvent, elle avait perdu certains de ses membres, sans adieux adéquats. Et O’Neill, militaire expérimenté, savait que ces plaies à jamais ouvertes étaient le prix à payer pour ce qu’il avait pu accomplir.
Il avait perdu suffisamment d’amis alors même qu’il n’avait jamais quitté sa minuscule planète, et d’autres étaient tombés depuis, à des années-lumière de leur foyer. Et, comme tant d’autres avant lui, il avait continué à s’endurcir, son visage ne trahissant plus les émotions ressenties. Il savait qu’il avait un devoir envers les morts. Mais celui envers les vivants était plus important encore.
La douleur qu’il ressentait désormais était différente. Plus perçante. Il avait à nouveau perdu un être cher. Pas quelqu’un avec qui il partageait le quotidien. Il ne le voyait que rarement, lorsque leurs obligations à l’un et à l’autre se croisaient. L’un et l’autre avaient été séparés par le vide qui séparait les galaxies, une culture, des connaissances, et tout simplement une apparence différente. L’un et l’autre avaient cependant appris à se respecter, à apprécier ces différences qui auraient effrayé tant d’autres. Leurs personnalités, en apparence opposées, avaient au contraire trouvé dans l’autre un ami. Le général savait que ses plaisanteries auraient un goût plus amer, lui rappelant une autre de leurs victimes consentantes qui ne pourrait plus les apprécier.
Mais il ne devait continuer, pour la simple raison que ses compagnons de route, et, consciemment ou non, des milliards d’êtres dans cette galaxie, comptaient sur lui. Il lui restait encore beaucoup à faire avant de pouvoir pleurer les disparus.
Thor… pensa-t-il en se remémorant ses premières rencontres “professionnelles“ avec le frêle Asgard, à chaque fois que l’un des deux avait eu besoin de l’expertise de l’autre pour éviter une catastrophe d’ampleur galactique.
Désormais, il regrettait de ne pas avoir pu passer plus de temps avec le “petit Gris“ des légendes urbaines. Se souvenant des rares fois où celui-ci avait pu accepter des invitations personnelles sur Terre, le militaire soupira. Il eut un sourire aigre-doux en se rappelant ses réactions face à des “subtilités culturelles“ présentées par O’Neill lors de quelque journée dénuée de crise.
Journée souvent suivie par les hurlements d’un général Hammond au bord de la crise de nerfs. Celui-ci avait été trop souvent poussé à bout en découvrant la nature de ces visites culturelles alors que son commandant en second lui confirmait, l’air contrit, qu’il venait de découvrir la tolérance de la physiologie Asgard face à la bière (largement plus faible que celle des humains, à en croire l’exemple du Commandant Suprême de la Flotte), ou ses talents à une table de poker (tout aussi faibles, il pouvait en témoigner).
Son sourire disparut lorsqu’il se dit que la petite cabane dans une forêt anonyme du Minnesota ne servirait jamais plus de décor pour ces scènes étranges qu’étaient des parties de pêche impliquant plusieurs représentants d’espèces extraterrestres. O’Neill soupira.
Il n’en demeurait pas moins qu’il devrait attendre pour faire son deuil. Il n’en avait tout simplement pas le temps, alors que la situation, jusqu’alors désespérée, venait de changer brusquement. Les Asgard étaient bel et bien morts, mais ils avaient cependant laissé derrière eux un témoignage. Un héritage. Une mission, que devait accomplir la Cinquième Race.
Le déferlement qu’était l’invasion Ori ne cessait pas, et O’Neill savait très bien qu’il n’y aurait pas de miracle face à un tel ennemi. Ou que, s’il y en avait, il ne serait pas du côté des derniers résistants. Mais s’il n’y avait pas de miracles, il restait cependant une chance. Mince, désespérée, mais bien présente. Et, depuis plus de dix ans, lui et le reste du SGC n’avaient fait que ça : transformer des essais jugés impossibles par la théorie, le bon sens et les lois de la physique.
Il allait une fois de plus devoir mettre les probabilités en échec.
Moins d’une heure plus tard, ses yeux ressentirent brusquement le besoin de s’adapter alors que la luminosité ambiante venait de s’accroitre. Le général observa un instant ses alentours, son environnement étant passé de la grisaille caractéristique des parois de béton du SGC à la lumière éclatante et multicolore d’une anonyme planète de la Voie Lactée.
Par réflexe, il eut un geste vers son arme lorsque deux figures quittèrent la végétation pour se rapprocher de lui, mais s’interrompit en reconnaissant deux jaffas qu’il avait vu quelques semaines plus tôt, dans une rencontre du même acabit.
Ceux-ci l’accompagnèrent sur quelques kilomètres jusqu’à un campement, que le général n’eut aucun mal à identifier comme étant au mieux temporaire. Les stocks de nourriture étaient entreposés dans un coin, gardés en permanence, tandis qu’une fosse hâtivement creusée abritait les déchets des occupants. Sur le visage de ceux-ci, O’Neill pouvait lire de la lassitude et de la peur. Ces quelques douzaines de jaffas savaient parfaitement que leur lutte ne verrait probablement pas d’issue heureuse.
Instinctivement, il repensa aux premiers jours de la rébellion jaffa, lorsque les rares alliés aux côtés desquels il s’était personnellement battu étaient davantage persuadés d’accomplir un suicide spectaculaire plutôt que de mener un combat qui pourrait être un jour remporté.
Des années de lutte, des alliés improbables et une combinaison de facteurs imprévus avaient pourtant mis à bas l’hégémonie des parasites sur sa galaxie natale. Une pensée qui aurait dû lui remonter le moral. Mais, étant tout sauf stupide, il savait que la situation était différente, avec un adversaire bien plus avancé, à la volonté unique, et surtout à cause de la cruelle absence des Asgard. Eux seuls pouvaient protéger durablement la Terre, ce qui avait fait d’elle la forteresse ayant rendu possible tout ce qu’il avait accompli les années précédentes.
- Humain ! l’accueillit le vieux jaffa qui dirigeait le camp.
- Bra’tac, répondit simplement O’Neill.
- Par ici, dit-il en se dirigeant vers une tente anonyme, éloignée de l’imposante structure centrale, que le général identifia aussitôt comme un leurre destiné à subir la frappe initiale d’une éventuelle embuscade.
Une fois à l’intérieur, Bra’tac fit sortir les autres jaffas du QG improvisé, dans lequel plusieurs hologrammes flottaient autour d’une table. On y trouvait aussi des rapports, des cartes et d’autres objets qu’O’Neill ne pouvait reconnaitre malgré sa longue expérience.
- Quelles nouvelles de la Tau’ri ? demanda le jaffa sans préambule.
- Mauvaises. Le site Gamma a été trouvé et détruit. Les Ori attaquent directement, maintenant.
- Bien sûr, tous les autres sont tombés. Autre chose ?
- Oui… Les Asgard… ne pourront plus nous aider. Ils sont… partis.
Les regards des deux vieux soldats se croisèrent l’espace d’un instant, et Bra’tac décida de ne pas poser plus de questions à ce propos, laissant O’Neill continuer :
- Ils nous ont laissé quelque chose avant de partir.
- Nous avons besoin d’armes, O’Neill.
- Il y en a. Et elles fonctionnent contre les vaisseaux Ori.
D’un seul coup, le visage du vieux jaffa s’éclaira :
- Combien ? Est-ce que nous pouvons contre-attaquer ?
- Pas encore, soupira le général. Il n’y en a pas assez, et même Carter a du mal à comprendre comment en faire d’autres. C’est pour ça que je suis venu, Bra’tac. Nous avons besoin de temps. Nous pouvons encore gagner cette guerre, mais seulement si on peut mettre ces canons sur tous nos vaisseaux.
- Nous n’avons plus de temps, humain ! Mes derniers guerriers désertent, trahissent ! Ils ont peur des Ori. Ils voient les Prêcheurs comme de vrais dieux ! Il nous faut une victoire, maintenant, sinon vous serez tous seuls !
- Je sais ! répondit brusquement O’Neill. Je sais ! Carter a proposé un plan pour ça. Gagner une victoire contre leurs vaisseaux, et du temps.
- Comment ?
- Il y a deux ans, on nous a offert un cadeau. Piégé. Le genre qui détruit une étoile si on l’active comme on nous l’avait conseillé. Sam s’en est aperçu à temps, et on a gardé l’engin à l’abri. Elle veut qu’on s’en serve pour démolir autant de leurs vaisseaux que possible. Si on peut tous les attirer au même endroit, on les détruira tous leurs engins d’un coup, et il leur faudra du temps pour ramener des renforts. Avec de la chance, ça suffira pour que Carter et ses crâne d’œufs nous sortent plein de nouveaux canons, et après ça, on pourra leur botter le derrière ensemble comme au bon vieux temps. Il faut qu’ils croient qu’on a pris contact avec les Anciens, et que… commença-t-il en exposant le plan imaginé par Jackson et Carter.
Il avait fallu deux semaines entières pour que Bra’tac parvienne à s’assurer que les fausses informations étaient bien arrivées chez les Prêcheurs, et O’Neill avait décidé de ne pas lui demander ce qu’il avait pu en coûter pour que ceux-ci jugent leur renseignement fiable. Le vieux jaffa lui avait clairement dit que ses derniers partisans l’abandonnaient et que, incessamment sous peu, il serait incapable de coordonner les quelques rares mouvements de résistance qui subsistaient sur les planètes occupées.
Regardant la caisse métallique contenant le ZPM piégé, il ferma un instant les yeux, en adressant une prière, sans véritablement savoir à qui ou quoi, alors qu’il avait, en une dizaine d’années, détruit des mégalomanes aux prétentions divines, rencontré des êtres aux pouvoirs bien réels, expérimenté la relativité de la vie et de la mort. Mais certains comportements ne pouvaient pas le quitter facilement, et les innombrables évènements étranges qu’il avait pu observer au cours de sa vie avaient tendance à le convaincre que la logique et la rationalité n’étaient pas les seuls guides de cet univers, quoi que puisse en dire Carter.
Il n’eut pas le temps de finir sa pensée qu’un flash aveuglant l’engloutit avant de s’évanouir, l’ayant emporté avec la caisse et le chariot.
Habitué aux téléportations vers les vaisseaux indirectement sous ses ordres, le général fut trahi par ses réflexes, cherchant instinctivement ses repères habituels pendant quelques instants, avant de se rappeler qu’il n’avait pas été amené sur le pont de commandement, mais dans l’une des baies de transport. Celle-ci, relativement vaste, n’abritait qu’une fraction infime de l’activité habituellement présente, ce qui lui facilita la tâche pour reconnaître l’individu qu’il cherchait.
- Colonel, dit-il en s’approchant de l’homme en tenue de bord.
- Bienvenue à bord, général, répondit le colonel Davidson, en le saluant.
Après avoir fait de même, O’Neill désigna d’un geste le chariot qui avait été amené avec lui :
- Dites à vos hommes de préparer l’engin, je vais vous briefer sur les détails de la mission.
- Thomson, amenez ça au sas principal, dit le colonel à l’un de ses hommes, qui acquiesça aussitôt.
Les deux officiers regardèrent le membre d’équipage s’éloigner en poussant, escorté par une demi-douzaine de Marines, le générateur multimillénaire devenu arme. Une fois le groupe suffisamment éloigné, le commandant du vaisseau tourna la tête vers O’Neill :
- Vous pensez que ça va marcher ?
- C’est pas plus dingue que les autres plans de Carter, se contenta de répondre le général.
- Bien ce que je craignais… Le reste de mes officiers vous attend dans la salle de briefing aéro. Est-ce qu’on doit recevoir d’autres fichiers d’en bas ?
- Non, fit son supérieur en lui montrant un petit objet aisément reconnaissable.
- Qu’est-ce que… commença Davidson en écarquillant les yeux.
- Pas de commentaire, colonel. Apparemment, certaines huiles à Washington savent si bien tenir leurs langues qu’on a des foutus produits dérivés pour un programme secret ! Comme si on avait besoin de ce genre de problème de sécurité maintenant. Enfin, cadeau d’anniversaire de Daniel… grommela-t-il en enlevant la coiffe de la réplique de lance jaffa pour révéler un port USB. Enfin, c’est pratique.
L’autre haussa des épaules avant de continuer :
- C’est l’important. Sinon, mon second est sur la passerelle pour les derniers préparatifs…
- Je reste à bord pour toute l’opération, donc j’aurai le temps de lui expliquer le reste. De toute façon, ce n’est pas comme si j’avais autre chose à faire.
Il se retourna et embrassa un instant du regard ses environs.
- Beau commandement que vous avez, colonel.
- Je sais, mon général. Merci.
- Non, vraiment, profitez-en. Je ne devrais pas vous le dire, mais la nouvelle vient de tomber : les politiques ont décidé de jeter un os aux gars de la Marine…
Le regard de Davidson s’assombrit, celui-ci voyant de quoi voulait parler l’homme grisonnant.
- Les Daedalus sont redevenus des croiseurs, et on va les laisser à, et je cite, “un corps plus expérimenté et adapté aux spécificités de ces engins“. Ha !
- Qu’est-ce qu’ils ont comme expérience du combat spatial ?
- Il faut le leur demander. Enfin, les ordres… Bref, dès qu’on aura recommencé à respirer avec tout ça, on va leur laisser la place.
- Je vois… Dernière mission, donc ?
- Quasiment, colonel, quasiment. Essayons de terminer en beauté…
- A vos ordres, répondit celui-ci en ouvrant la porte du hangar.
- Mon général ! l’appela une voix au fond de celui-ci, le forçant à se retourner. Vous avez oublié ça !
O’Neill vit l’un des Marines se lancer dans sa direction, tendant un petit objet dans sa main.
- Je vous rejoins, colonel, fit-il, laissant l’officier avancer dans le couloir tandis que lui-même revenait dans la grande salle.
Il n’eut que le temps de faire quelques pas à l’intérieur qu’il fut rejoint par le militaire, qui lui tendit un badge d’accès.
- Merci beaucoup, caporal. J’aurais été bon pour de la paperasse si je l’avais per… commença-t-il avant d’être projeté brutalement dans les airs.
Les réflexes prirent immédiatement le dessus sur toute forme de raisonnement conscient, et l’officier commença à pivoter afin de retomber dans une position optimale. Des années durant, il avait exercé l’un des métiers les plus dangereux du monde, au vu du nombre de collègues et d’amis dont il avait prononcé les éloges funèbres. En tant que survivant, tant des opérations sur Terre qu’ailleurs, il avait non seulement appris à tomber correctement, mais aussi à réfléchir très vite.
Ce fut pour cela qu’il n’avait pas parcouru le quart du chemin le séparant du plafond qu’il se rendit compte que quelque chose posait problème. Quelque chose d’autre que le fait d’avoir été projeté dans les airs à bord d’un vaisseau de guerre en orbite autour de sa planète natale.
Il ne retombait pas.
Aussitôt, O’Neill fit une autre série de mouvements et se retrouva à se diriger les jambes les premières vers le plafond.
On a perdu la gravité artificielle ! C’est grave !
Quelques instants plus tard, le général se reçut brutalement sur la paroi métallique et parvint à s’amortir suffisamment pour attraper un support d’entretien, le tenant quelques instants avant de le lâcher. Sa trajectoire modifiée, il parvint à s’arrêter en percutant une poutre au niveau de son épaule. Grimaçant, il se mit néanmoins aussitôt dans une position de blocage et commença à observer ses environs.
Autour de lui, l’éclairage d’urgence s’était activé, les gyrophares illuminant le hangar où humains et objets volaient dans tous les sens, les premiers tentant d’éviter les seconds et de trouver un support quelconque pour se fixer. Quelques secondes plus tard, O’Neill trouva ce qu’il cherchait, et, d’une impulsion supplémentaire, se lança vers le chariot qu’il avait amené à bord. Une fois à proximité, il parvint à s’emparer de son support, et, d’un effort, évita de le renverser.
En un instant, le général retrouva ses repères, et avança avec sa charge vers une salle située dans un renfoncement de la coque, remerciant d’une pensée silencieuse le technicien qui avait jugé valable de recouvrir la caisse d’un matériau amortisseur. Incapable de freiner suffisamment, il percuta la vitre blindée de salle de contrôle du hangar, s’accrochant d’une main à la porte de celle-ci. Il lâcha cependant un léger cri lorsque le lourd chariot commença à partir dans la direction opposée et dû être retenu par son autre bras. L’officier sentit une douleur aiguë et serra des dents jusqu’à ce que sa charge fût entièrement immobilisée, flottant dans l’air. Il ouvrit alors la porte et entra dans la pièce vide, se dirigeant vers une série d’ordinateurs encore allumés.
Sur l’écran d’accueil, le général entra une combinaison de codes d’accès à usage unique, qui lui donna automatiquement le contrôle de l’ensemble des systèmes. Une brève série de commandes fit s’afficher sur les écrans un ensemble de consoles virtuelles émulant plusieurs fonctions vitales du vaisseau.
Il ne put empêcher son visage de pâlir lorsque son regard se posa sur l’affichage de l’état structurel, le noir et le rouge dominant l’ensemble des plans du croiseur, le hangar où il se trouvait étant l’une des rares sections à ne pas avoir été touchée par ce qui avait ravagé le vaisseau. Il se figea quelques instants lorsqu’une seconde lecture, plus détaillée, du rapport de dégâts, lui indiqua une dépressurisation massive de la coque, les couloirs adjacents au hangar jusqu’à l’ensemble des quartiers d’équipage étant désormais exposés au vide spatial.
O’Neill déglutit, puis reporta son attention sur une autre section du vaisseau, et ferma les yeux en voyant que la passerelle de commandement n’émettait tout simplement plus le moindre signal de statut, probablement détruite elle aussi.
Il se rendit vers l’un des téléphones de bord, situé près de la porte, et appuya sur un bouton peint d’une couleur différente de ses voisins. Aussitôt, un sifflement vint se faire entendre depuis les haut-parleurs, avant d’entendre sa voix en écho au fur et à mesure qu’il parlait :
- A tout l’équipage, ici le général O’Neill. On vient d’être touchés et la passerelle ne répond plus. Je prends le commandement. Toutes les sections, rapport d’avarie, pour le poste… 41-12. Terminé.
En quelques minutes, il eut une estimation plus précise de la situation, faisant mentalement la liste des secteurs qui ne répondaient tout simplement pas et arrivant à la même conclusion que celle donnée par les ordinateurs.
- Plus de moteurs, plus d’armes, plus de bouclier. Journée pourrie… sûrement un lundi, grommela-t-il avant de reprendre le combiné du téléphone de bord.
- Ordre à tout l’équipage. Evacuez le vaisseau si vous le pouvez. Je répète, évacuation ! O’Neill, terminé.
Il se rendit cette fois-ci devant l’une des autres consoles et regarda le terminal de communication émulé. Sans hésiter, l’ancien chef de SG-1 sélectionna la fréquence d’urgence, espérant que les antennes secondaires seraient suffisamment intactes pour transmettre son message. Une fois les réglages effectués, il se rendit sur la console voisine tout en commençant à parler :
- O’Neill à SGC. Urgence. Passez-moi Landry.
Sans attendre de réponse, il parcourut d’un regard la liste des caméras extérieures, se figeant sur l’une des rares icônes demeurées verte. Il la sélectionna, et, en voyant la scène s’afficher sur l’écran, sentit ses forces l’abandonner.
Non…
- Non… murmura-t-il à nouveau, en regardant, derrière les débris du croiseur, la surface de la Terre parcourue de cendres et de brasiers de la taille de pays, alors que, au loin, le dard caractéristique d’un vaisseau Ori venait continuer un travail de destruction presqu’absolu.
Il avait finalement échoué.
Après plus de dix ans à protéger son pays et sa planète de menaces toujours plus dangereuses, à réussir de justesse, il avait failli à son devoir. Le général venait, en quelques instants, de voir tout ce qui justifiait son être, ses sacrifices, ses actions, s’évanouir. Son masque de calme et de maîtrise apparente des situations les plus dangereuses venait de perdre toute raison d’être, et il se laissa tomber dans le siège derrière lui.
Régulièrement, un nouveau tir venait rayer de la carte une région du globe, perçant le manteau terrestre jusqu’au magma et emplissant l’atmosphère de cendres brûlantes condamnant sans merci les éventuels survivants de l’attaque.
C’est fini… pensa-t-il sombrement en se levant.
D’un pas rendu lent par l’absence de gravité, O’Neill se dirigea vers le chariot qui flottait devant la porte. Le plaquant sur le sol, il ouvrit un petit clapet derrière lequel était abrité un clavier numérique. Par des gestes lents, le général commença à entrer le code d’accès qui lui avait été fourni pour cette mission spécifique.
- Pas besoin de la balancer chez Râ, celle-ci, dit-il à voix basse en regardant l’écran lui demander d’entrer le délai du compte à rebours.
Tapant une valeur à un chiffre, il s’apprêta à valider sa sélection lorsqu’une voix familière vint se faire entendre, le figeant dans son geste.
- … que quelqu’un m’ent… ète, ici le… nel Carter, Starg… and.
Le général se redressa brusquement, et, emporté dans son élan, se vit entrainé vers le plafond. Prenant appui sur celui-ci, il retourna vers le sol, prenant prise sur les bords de la console :
- Carter ! appela-t-il. Rapport !
- … al, c’est vous ?
- Vous entends deux sur cinq, Carter. Répétez !
- Le SGC et le… détruits… al Landry tué, je suis… Qu’est-ce qui…
- Carter ! dit-il en remerciant le ciel de la seule bonne nouvelle venant éclairer le cauchemar qu’il vivait alors que son esprit tournait plus vite que jamais avant. Est-ce que vous pouvez aller au niveau moins cinquante ?
- …
- Sam ?
- … Oui, mais… dur.
- Tout le monde est mort dehors, Sam !
- …
- Allez-y. Activez le Jumper. Vous m’avez compris ? Activez le Jumper !
- … sieur, on ne peut…
- La ferme ! On va tous y passer, Sam ! C’est notre seule chance !
- … vos ordres, monsieur.
- Bonne chance, Sam.
- Mon… al. Je…
- Je sais, Sam. Je sais. Allez-y, maintenant. Vous avez une demi-heure, dit-il avant de couper la communication.
Il s’éloigna de la console sans se retourner, revenant près du chariot, tapant sur le bouton d’annulation avant d’entrer une nouvelle valeur.
Et c’est parti… pensa-t-il en voyant le compte à rebours s’afficher et commencer à défiler.
Soupirant, O’Neill referma le clapet et, d’une impulsion, s’éloigna de la bombe pour revenir dans le grand hangar, où la vingtaine de membres d’équipage avait réussi à retrouver le sol. Avec un seul bond, il se rendit près de la lourde porte d’accès, autour de laquelle étaient rassemblés plusieurs hommes et femmes. D’un regard, il vit que le panneau de contrôle de la porte avait été brisé par un débris, et il donna une tape à l’épaule d’un sous-officier essayant de forcer l’ouverture :
- Pas besoin, c’est le vide derrière.
- Mon général, c’est le seul accès pour les capsules d’évacuation !
- Appelez-moi Jack. Et pas besoin de s’inquiéter pour ça.
- Qu’est-ce qui s’est passé, monsieur ? demanda un autre.
- Jack, j’ai dit, pas “monsieur“. On s’est fait casser la figure… Les Ori ont été plus rapides que nous. On a perdu.
- Mais, la Terre…
- Plus rien, sergent. Je viens de voir dehors.
- Qu’est-ce qu’on va faire ? demanda-t-il au milieu de quelques murmures d’accablement.
- Nous, ici ? Rien. Enfin, si, on va faire un sacré feu d’artifice pour fêter ça. Carter, par contre…
- Le colonel Carter ? voulut clarifier une autre personne.
- Ouaip. Le colonel Samantha Carter. Un foutu génie comme on en voit pas deux dans sa vie. Et une femme… Ah, de toute façon, ça ne change plus rien. Vous connaissez Retour vers le Futur ?
- … Pardon ? demanda le sous-officier en regardant O’Neill, pris au dépourvu par le brusque changement de sujet.
- Vous savez ? Marty McFly, la DeLorean volante et tout.
- Euh, oui, mais… quel…
- Hé bien Carter, elle a sa DeLorean, vous savez. Cadeau d’un Doc Brown Ancien. Et elle marche.
Devant les regards surpris de son auditoire, O’Neill fut pris de son premier sourire depuis le début de l’attaque.
- Bon, on va se poser, et je vais vous raconter une histoire, d’accord ? Normalement, c’est tellement secret que le Président m’étranglerait s’il était au courant, mais bon…
Une minute plus tard, il s’était posé sur une chaise flottant à quelques centimètres du sol, au milieu des survivants du hangar :
- J’étais encore en charge du SGC, à l’époque, quand cette vieille fouine de Maybourne nous a passé un coup de fil. J’étais un peu surpris, mais bon…
Le général O’Neill était en train de décrire l’intérieur du Jumper temporel lorsque le minuteur, à quelques dizaines de mètres de lui, marqua finalement zéro. L’instant d’après, le générateur bâti des éons auparavant par les Anciens reçut une série d’impulsions calculées très précisément pour maximiser le potentiel destructif de la brusque libération d’énergie. En une fraction de seconde, une bouffée de rayons gamma se forma, surpassant tout phénomène naturel jamais observé au cours des récents voyages menés par les représentants de l’Humanité. Ces mêmes rayonnements n’étaient que les effets dérivés du dégagement initial, qui avait donné le jour à des particules n’ayant plus parcouru l’univers depuis les instants ayant suivi sa naissance. Celles-ci désintégrées, il ne restait plus qu’une indescriptible quantité d’énergie cherchant à se disperser dans l’univers environnant.
Les différents obstacles s’opposant à son libre passage ne purent rien faire pour bloquer ou détourner le torrent de radiations. Les molécules furent brisées un infime instant avant les atomes et les hadrons, transformant une sphère toujours croissante de l’espace en un plasma de particules élémentaires. Le hangar désintégré, la haute atmosphère de la Terre ne constitua qu’un piètre rempart, ne donnant à la planète qu’un imperceptible répit avant que celle-ci ne s’évanouisse dans l’éclair. Les vaisseaux assaillants, eux, furent plus chanceux, leurs boucliers hautement avancés leur évitant la destruction pendant une durée se chiffrant en microsecondes.
En quelques minutes, l’étoile centrale du système solaire fut déchirée par l’objet qui avait résidé un peu plus tôt dans un chariot abandonné à quelques mètres de l’un des derniers groupes de Terriens sur des années-lumière.
EFFET PAPILLON
Chapitre 1 : Recrutement
2 septembre 2015, Ecole Polytechnique, Terre :
Après avoir vérifié une dernière fois l’état de son uniforme, le jeune homme ouvrit la porte devant lui et entra dans la pièce. Il n’eut pas le temps de faire un geste que le capitaine assis au bureau lui demanda :
-Aspirant Banet ?
-Oui, mon capitaine, répondit-il en tendant son badge d’identification.
L’officier compara la photo de celui-ci avec le visage de son interlocuteur, avant de lui rendre son dû.
-Le général vous recevra d’ici quelques minutes. Veuillez patienter.
-Entendu, mon capitaine, répondit Carl Banet en replaçant son badge au niveau de sa poitrine.
Il se dirigea alors vers l’un des sièges prévus pour les visiteurs et s’assit, se demandant une fois de plus la raison de cette convocation. Merde, qu’est-ce que j’ai pu faire pour valoir un sermon par le Vieux en personne ?
Au bout de quelques minutes, alors qu’il passait en revue les derniers mois pour trouver la cause de sa présence, le capitaine, derrière son moniteur, fit un geste imperceptible avant de tourner la tête vers l’aspirant.
-Vous pouvez entrer, aspirant.
Celui-ci se leva et salua nerveusement son supérieur avant de frapper légèrement à la porte le séparant du bureau du général.
-Entrez, dit la voix de celui-ci.
Il s’exécuta et se mit au garde-à-vous aussitôt la porte refermée.
-Aspirant Carl Banet au rapport, mon général, dit-il.
-Repos, lui répondit-il, avant de l’inviter à s’asseoir.
Le général commandant l’Ecole était assis à son bureau et y reposait proprement un dossier. Mais si Carl n’avait jamais pu y rentrer auparavant, quelque chose lui apparaissait immédiatement comme très anormal, à savoir l’élégante femme en civil qui se tenait aux côtés de l’officier. Celle-ci semblait observer attentivement l’aspirant, qui tentait à présent de se rappeler s’il l’avait jamais vue.
-Nous parlions justement de vous, monsieur Banet. Savez-vous pour quelle raison vous êtes ici ? demanda le général.
-Non, mon général, répondit Carl, qui se posait de plus en plus de questions.
-Tant mieux, le contraire aurait été problématique, n’est-ce pas ? répliqua l’officier en jetant un regard vers la femme.
-C’est le moins que l’on puisse dire, lui répondit-elle avec un très léger sourire.
-Bien, reprit le général en reportant son attention sur l’aspirant, vous êtes ici parce que cette personne ici présente a une proposition pour vous.
-Le service pour lequel je travaille, continua la femme, recherche des individus aptes à répondre à certaines exigences et, selon votre dossier, vous faites partie de cette catégorie.
Elle prit une chemise transparente sur le bureau et la tendit, en même temps qu’un stylo, à Carl.
-Veuillez signer ces formulaires. Il s’agit de votre accréditation au niveau de sécurité requis pour notre service.
Carl ouvrit la chemise et jeta un coup d’œil à son contenu, avant de ramener son regard sur ses deux interlocuteurs.
-Sauf votre respect, mon général, de quoi s’agit-il ? Le niveau d’accréditation n’est même pas indiqué sur ces formulaires.
-Vous n’êtes pas habilité à le connaître, aspirant, répondit-il en souriant discrètement.
-Bien sûr, vous pouvez choisir de ne pas signer, et la proposition sera abandonnée. Soyez assuré que vos études et votre carrière n’en pâtiront pas.
Carl regarda une seconde fois le document dans sa main.
-De toutes façons, je suis autorisée à vous dire que vous aurez toujours la possibilité de renoncer à notre offre avec ces mêmes garanties après avoir signé ces documents, termina la femme.
Carl se tourna vers le général, qui hocha la tête en disant :
-Elle dit la vérité, aspirant. Votre place vous attendra le temps que vous preniez une décision.
Avec un léger soupir, il prit le stylo et signa les deux copies du document, avant de les remettre dans leur chemise et de tendre celle-ci à la femme.
-Excellente décision, approuva-t-elle en souriant avant de se tourner vers le directeur de l’école. A présent, si vous voulez bien nous excuser, général…
-Allez-y, répondit celui-ci. Bonne chance à vous, aspirant.
-Merci, mon général, dit Carl en se levant et se mettant au garde-à-vous.
En sortant du bureau, il demanda immédiatement à sa nouvelle guide :
-Où allons-nous ?
-Vous verrez bien, aspirant.
-….D’accord. Après tout, c’est votre service.
-Voilà, répondit-elle.
-Est-ce que vous pouvez au moins me dire pourquoi vous m’avez voulu moi plutôt que d’autres ? Je veux dire, je ne suis pas le mieux noté de l’Ecole, que ce soit en sport ou dans les matières scientifiques.
-Votre parcours académique ne représente qu’une partie des qualités recherchées. Vos supérieurs vous décrivent comme réactif, curieux, capable de prendre des décisions et chanceux. Si vous disposez en plus d’une formation à la fois scientifique et militaire, votre profil n’en est que plus intéressant pour nous.
-Euh, sûrement, répondit Carl, qui cherchait à déterminer la nature du service dans lequel on voulait le recruter.
Après quelques minutes de marche dans le bâtiment principal, elle lui fit signe de la suivre vers un escalier qui menait vers la chaufferie du sous-sol. La suivant, il s’apprêtait à lui demander où elle le menait quand il vit, derrière une porte habituellement fermée à clef, deux hommes armés qui avaient une tenue identique à celle des soldats postés sur la base, à l’exception de leur arme, qui ne correspondait à aucune de celles qu’il avait pu voir lors de sa formation militaire. S’il reconnaissait facilement des fusils d’assaut à leur aspect général, les armes provoquaient en lui un léger malaise. Il voulut interroger son guide à ce propos, mais n’en n’eût pas le temps alors qu’elle refermait la porte derrière eux, les laissant dans une petite pièce sans issue. Avant qu’il ne puisse dire un mot, elle sortit de l’une de ses poches un petit objet qu’elle lui tendit en disant :
-Prenez la balise et placez-la sur votre uniforme. On est presque arrivés.
-Attendez, répondit-il brusquement. A quoi ça rime ? Vous ne m’avez pas fait signer ces documents pour me faire visiter les chaufferies, non ? Ne me dites pas que votre QG est sous l’Ecole, quand même ?
-Faites ce que je vous dis, et je répondrai aux autres questions dans une minute, chrono. Promis.
Restant sur ses gardes, il obtempéra avec méfiance, examinant le petit objet sous tous les angles avant de le coller sur sa veste.
-Merci, dit-elle avant de prendre un autre dispositif, ressemblant à une radio. Cassie à Central, demande retour à l’académie pour deux personnes, balises standard.
Au bout de quelques secondes, Carl voulut demander une fois pour toutes des explications à la femme devant lui. Il ouvrait la bouche quand un flash blanc l’aveugla un bref instant.
Le changement de décor mit Carl sur la défensive pendant qu’il cherchait à comprendre l’évènement impossible qui venait de lui arriver. Lorsque la lueur blanche avait disparu, la petite pièce du sous-sol était devenue une imposante salle grise sans aucune indication à part les deux portes et la petite fenêtre à quelques mètres de lui.
-Que s’est-il passé ? demanda-t-il quand il fut enfin en état de parler.
-Nous venons d’être téléportés sur la face cachée de la Lune, dans un complexe international qui sera, si vous le désirez, votre nouveau foyer pour les quelques années à venir, répondit-elle en anglais.
Il secoua légèrement la tête et répéta, cette fois-ci en anglais, avec un regard plus effrayé qu’avant :
-Sérieusement, où sommes-nous ?
Elle soupira légèrement, et répondit :
-Allez voir par le hublot, il est là pour ça.
Prudemment, Carl avança vers celui-ci et dut se forcer pour retenir une exclamation de surprise à la vue du spectacle qui s’offrait à lui : Le paysage désolé de la Lune s’étendait à perte de vue, et la seule chose qui perçait la nuit était un petit groupe d’hommes en combinaison spatiale qui éclairaient le côté d’un bâtiment sur lequel ils travaillaient. Plaquant ses mains sur les côtés de son visage, il attendit que sa vision s’adapte aux ténèbres omniprésentes, et commença enfin à distinguer le reste des installations. Il y avait peu de structures visibles, mais celles-ci ne ressemblaient pas aux installations spatiales qu’il avait pu voir en photo ou vidéo. Au lieu des installations modulaires squelettiques auxquelles il s’attendait, les bâtiments étaient construits en dur comme sur la Terre.
Il se retourna et demanda :
-C’est un décor, c’est çà ? Personne n’aurait pu amener autant de matériel là-haut sans qu’on ne s’en aperçoive. Et puis ces installations sont trop petites pour gaspiller autant d’espace avec une telle pièce.
-Et…comment connaissez-vous la taille de ces ‘installations’, monsieur Banet ?
-Je les ai vues par le hublot que vous m’avez désigné, et une base pour un service quelconque devrait quand même être plus grande, sans même parler de l’inutilité d’être positionnée sur la Lune.
-D’accord, Sherlock, répondit-elle avec un large sourire. Avant de vous laisser repartir, j’aurai un autre phénomène nécessitant votre sagacité, si ça ne vous dérange pas.
Sans attendre sa réponse, elle se retourna et ouvrit la plus petite des deux issues, avant de lui dire de venir.
La pièce dans laquelle ils se trouvaient désormais était recouverte d’indicateurs de danger en diverses langues.
-Vous voulez une preuve, donc ? dit la femme en s’approchant d’une porte aux rayures jaunes et noires avant de taper sur les touches d’un clavier près de la porte.
Une voix sortant d’un haut-parleur annonça :
-Identification vocale et rétinienne requise pour exécution de la commande.
-Cassandra Frasier, service Terre, répondit celle qui était à l’origine de cette requête.
-Identification acceptée. Ouverture du sas. Veuillez rester impérativement derrière la ligne jaune pendant votre sortie.
-Oui, oui…Bon, Carl, vous venez ?
Il obéit alors, et s’apprêtait à la rejoindre quand la porte à rayures s’ouvrit, dévoilant le même paysage que celui qu’il avait vu par la fenêtre et s’arrêta brusquement.
-C’est un décor, donc il n’y a pas de risque, non ? continua son guide en franchissant la porte.
Au bout de quelques secondes d’hésitation, il se dirigea vers elle et, gardant les mains en avant comme pour chercher un obstacle invisible, posa le pied sur la structure rocailleuse et repéra immédiatement la ligne jaune brillante qui formait un cercle centré sur la porte.
Il resta sans voix devant le paysage lunaire.
-Joli, hein ? demanda Cassandra.
-Co…..comm….comment est-ce possible ? On est vraiment…
-Oui, bienvenue sur la face cachée de la Lune.
-Mais….nous respirons, il n’y a pas de décompression et il ne fait pas quelques degrés au-dessus du zéro absolu ! dit-il d’une voix effrayée.
-Tant que vous restez de ce côté de la ligne jaune, ce sera le cas. Je ne connais pas tous les détails techniques, mais on a installé des champs de forces qui peuvent empêcher le départ d’une atmosphère chauffée et des rayonnements infrarouges. Alors, profitez de la vue et arrêtez de poser des questions inutiles, d’accord ?
Il voulut ramasser une petite pierre à ses pieds et faillit tomber lorsque son corps fut emporté par un élan trop important. Sa guide le rattrapa à temps.
-La gravité artificielle s’arrête à la porte, par contre.
-Ne me dites pas que vous avez ça aussi !? On nage en pleine SF, là, une base lunaire, des téléporteurs, des champs de force, de la gravité artificielle. Ca va être quoi, après, l’U.S.S. Enterprise ?
-Presque, presque, lui dit-elle avec un regard de plus en plus amusé. Enfin, rentrons, voulez-vous ? Il reste encore pas mal de choses que vous devez voir avant de décider.
-Décider quoi ? demanda-t-il alors qu’il se doutait de la réponse à venir.
-Si vous voulez rester avec nous ou rentrer sur Terre, bien sûr.
Chapitre 2 : Arrivée
Carl reprit rapidement ses esprits :
-Attendez un instant, demanda-t-il. Qu’est-ce que vous voulez de moi exactement ?
Se retournant, sa guide lui répondit simplement :
-Que vous suiviez ici une formation vous permettant d’intégrer efficacement le programme Porte des Etoiles.
-Et, c’est quoi exactement, ce…programme ? hésita-t-il.
-Le groupe international supervisant toutes les technologies obtenues lors de nos contacts des vingt dernières années avec le reste de la galaxie.
-Question stupide, réponse…
Elle lui sourit alors et reprit son chemin, suivie par le jeune homme, qui dévorait du regard son environnement. Ils étaient dans un complexe qui ne différait en presque rien d’un immeuble administratif normal, à l’exception des quelques patrouilles militaires qui semblaient en rappeler constamment le statut. Une quasi-normalité étonnante aux yeux de Carl qui, après les dix dernières minutes, n’aurait pas été surpris de croiser des astronautes aux combinaisons colorées se rendant dans leur fusée tout droit sortie d’un vieux roman de science-fiction.
Se dirigeant vers un ascenseur, Cassandra lui tendit un badge d’accès qui portait déjà sa photo.
-Gardez-le sur vous tant que nous serons à l’intérieur, lui dit-elle en affichant un air sérieux. Sans lui, vous aurez de nombreuses chances de vous faire tirer dessus à vue, en bas.
-Et ben, on dirait que la sécurité est plutôt serrée, chez vous, répondit-il en lui obéissant.
-On a eu le droit à suffisamment de tentatives d’infiltration pour ne plus prendre de risques, monsieur Banet. Et une personne non autorisée aura du mal à convaincre qui que ce soit qu’elle s’est perdue pour arriver ici.
-L’un des avantages d’être sur la Lune, je parie.
La porte de l’ascenseur s’ouvrit.
-Exactement.
Quand l’ascenseur se mit à descendre, un silence gênant s’installa lentement, alors que Carl ne savait pas quoi répondre.
-Et, comment êtes-vous rentrée dans ce…programme, si ce n’est pas indiscret ? hasarda-t-il finalement.
-J’ai été adoptée par le médecin du premier SGC, après qu’une attaque biologique ait anéanti le reste des habitants de ma planète natale.
-Je suis déso…attendez, vous ne venez pas de la Terre ? s’exclama Carl, incrédule.
-Pas le moins du monde, mais, aussi bizarre que cela semble, l’humanité était présente partout dans la Voie Lactée longtemps avant la découverte de la Porte sur Terre. Enfin, vous verrez ça en temps voulu, avec le reste de ce qui s’est passé depuis l’incident Littlefield en 45.
-La Porte ? demanda le jeune homme, alors que l’ascenseur s’immobilisait pour laisser sortir ses occupants.
-Pour être brève, un système de voyage interstellaire extraterrestre. De toute façon, vous aurez largement le temps d’en apprendre plus par la suite, donc autant en venir à l’objet de cette…visite. Voici l’académie Langford, dit-elle en englobant du geste les lieux autour d’eux. Si vous le décidez, vous pourrez passer les prochaines années ici à étudier ce qui est nécessaire pour faire partie du programme à part entière.
-Etudier quoi, exactement ?
-Ca dépendra de vos choix, bien sûr. Nous avons autant besoin ici d’officiers militaires que d’archéologues, de physiciens, de biologistes, de diplomates, d’ingénieurs ou de linguistes. Votre formation initiale va probablement vous inciter à suivre un cursus scientifique ou militaire, mais en tant que jeune recrue, vos possibilités restent largement ouvertes.
-Euh, et si j’acceptais, qu’est-ce qui m’arriverait officiellement ? Je serais ‘’effacé’’ des bases de données, vous me feriez oublier de tous ?
-Nooon, répondit-elle en prenant un air rassurant. Ce serait beaucoup trop compliqué, vu le nombre de personnes que le programme concerne. Vous aurez juste une affectation militaire officielle à un endroit éloigné des personnes qui vous connaissent, et vous pourrez rentrer fréquemment sur la Terre si vous le voulez, mais sous une certaine surveillance pour éviter les fuites.
-Vous ne restez pas en permanence sur votre base, à, je ne sais pas, défendre la Terre des menaces extraterrestres ?
-Pas en permanence, bien sûr que non. C’est un travail comme un autre, à l’exception de l’environnement, des moyens mis à notre disposition…et des responsabilités. Nous prenons tous nos week-ends, mais de manière décalée les uns des autres. Par contre, quand il y a une crise, c’est évidemment la mobilisation générale.
-Je rêve…même les organisations secrètes n’échappent pas aux 35 heures, conclut Carl.
Ignorant la remarque, Cassandra ouvrit alors une porte et fit signe à Carl de la suivre. Ils continuèrent dans un couloir et arrivèrent finalement dans un hall d’entrée imposant.
-Nous y voilà. Il reste une dernière chose que vous devez voir avant de prendre votre décision, dit-elle en indiquant de la tête un mur devant lequel plusieurs personnes semblaient rester immobiles.
Carl s’en approcha, intrigué, et put apercevoir une liste de noms qui occupait une part importante du mur.
-Ce sont… ?
-Oui, tous ceux et celles qui ont trouvé la mort dans leurs fonctions au service du Programme. Ma mère adoptive a son nom sur la seconde colonne. Le mémorial a été placé ici pour rappeler aux élèves dans quoi ils se sont engagés.
Il s’approcha du monument et le regarda en silence, ne sachant quoi penser ou dire face à celui-ci. Finalement, il revint près de son guide, qui lui dit alors :
-Maintenant, vous avez une semaine pour décider si vous restez ou non avec nous.
-Comme ça ?
-Comme ça.
Elle commença à se diriger vers l’entrée de la pièce, et Carl la rattrapa en pressant le pas.
-Pas besoin d’une semaine.
Cassandra se retourna et lui sourit :
-Bienvenue à bord.
Deux longues semaines avaient passé depuis son choix, et il les avait passées sur Terre, dans l’environnement pour lequel il avait travaillé des années, et qui lui semblait à présent dérisoire face à ce qu’on venait de lui proposer. On lui avait annoncé une mutation dans un centre d’enseignement annexe, et des rumeurs avaient circulé dans l'École quant à son éventuel recrutement par la DGSE. Il savait pertinemment que ces rumeurs étaient fausses, mais ne prit pas la peine de les démentir ou de les confirmer, se doutant qu’elles devaient faire partie de sa couverture. Enfin, un sous-officier vint lui annoncer son départ, au moment où il allait vers l’un des terrains de sport. Ne lui laissant pas la moindre marge de manœuvre, le sergent le mena jusqu’à une pièce isolée, où il lui tendit la balise de téléportation, que Carl reconnut immédiatement comme telle.
L'accrochant à son uniforme, il eut à peine le temps de commencer à fermer les yeux que le flash l'éblouit à travers ses paupières. L'endroit que ses yeux virent la seconde suivante était celui auquel il pensait sans arrêt depuis l'avoir visité une quinzaine de jours auparavant, mais avec une différence de taille. En effet, devant lui se tenait un groupe disparate d'hommes et de femmes qui semblaient tous et toutes dévorer leur environnement du regard.
-Vous attendez avec les autres, le temps qu'on vous dise où vous serez affecté, compris ? lui dit sans la moindre forme de tact le sergent qui l'avait accompagné.
-Euh, oui, répondit distraitement la nouvelle recrue en s’approchant du groupe.
-Bonjour, entendit-il quelqu’un lui dire en anglais.
Répondant de même, il s’approcha de la personne qui lui avait parlé :
-Carl Banet, étudiant, se présenta-t-il.
-Alexander Borisovich Leonov, technicien nucléaire.
-Alors, vous aussi, vous avez reçu la visite de quelqu’un qui vous a parlé de ce « Programme » avant de vous y proposer une place ?
-Non, en fait, j’ai remarqué des aberrations dans l’usine où je travaillais et j’en ai fait part à mes supérieurs, lui répondit son interlocuteur dans un anglais approximatif. Et après, on m’a envoyé quelqu’un me dire que j’avais le choix entre perdre mon boulot et ma situation ou l’accompagner pour quelque chose de mieux payé et de plus intéressant.
-Ouille. Enfin, vu ce que j’ai pu voir d’ici, on a tous les deux fait le bon choix.
-Je ne sais pas. Moi, ça me fait un peu peur, tout ça. Je travaillais dans une usine de production d’armes nucléaires, vous comprenez. Elle a été relancée il y a quelques années et en produisait de grandes quantités. Moi, je me suis rendu compte que les cargaisons d’uranium enrichi étaient presque vides. Enfin, elles contenaient bien quelque chose, mais ça n’avait aucun sens.
-Comment ça ? demanda Carl, pris d’intérêt par ce que lui disait le technicien.
-Les containers sont pesés avec des balances de précision pour détecter tout vol d’une partie de la marchandise. Mais ceux que j’ai vus avaient moins du quart du niveau normal, alors qu’ils pesaient le bon poids.
-Attendez un instant, Alexander. L’uranium est l’un des matériaux les plus denses qui soient. Alors si le container pesait le bon poids…
-Oui, son contenu…
-Un peu de calme, je vous prie, mesdames et messieurs, annonça un homme qui s’était rapproché du groupe. Son intervention mit un terme quasi-immédiat au brouhaha et il continua. Vous avez sans aucun doute des questions, mais elles viendront plus tard, rassurez-vous. Tout d’abord, je tiens à vous souhaiter la bienvenue sur l’Académie Catherine Langford. Pour ceux l’ignorant encore, nous sommes sur la face cachée de la Lune, dans un complexe international. Vous êtes ici parce que, tout d’abord vos compétences peuvent s’avérer utiles à notre « Programme », mais aussi et surtout parce que vous avez accepté de venir et de faire un saut dans l’inconnu. Et, faites-moi confiance, il ne s’agit que du premier d’une très longue série… Enfin, je vous prie de rendre vos balises de téléportation au sergent Andul, qui vous remettra vos badges d’identification. Vous serez ensuite pris en charge par un élève plus ancien qui vous amènera dans votre dortoir et vous expliquera les règles de l’Académie.
Avant de vous laisser, une dernière précision : L'Académie fonctionne sur l’horaire GMT, et il est donc 8 heures 12. Vous avez tous rendez-vous à midi dans l’amphithéâtre Littlefield pour le discours de bienvenue. Soyez à l’heure, compris ?
Les différentes personnes présentes répondirent par l’affirmative avec plus ou moins de vigueur, et l’orateur les remercia avant de les quitter, alors qu’un militaire s’approchait d’eux, procédant à l’échange des balises.
Sans s'éloigner du technicien russe, Carl observa attentivement un second groupe qui se rapprochait des nouveaux arrivants. Ceux qui, à son avis, devaient être ces "élèves", formaient un groupe aussi hétéroclite que le premier. Leur attitude décontractée contrastait avec l'impression martiale qui caractérisait le sergent venu lui fournir son passe.
A peine une minute plus tard, celui-ci s'éloigna de la salle et les élèves sensés les accueillir se rapprochèrent brusquement des recrues.
-Carl ? l'appela une femme.
-Oui ? répondit-il sans conviction.
-Carlotta Gerais, se présenta-t-elle en lui serrant la main. Je vais te montrer tout ce que tu dois savoir ici. Ça ne te dérange pas qu'on se tutoie, au moins ?
Sa "tutrice" était souriante et énergique, malgré ses cheveux blancs et les rides qui trahissaient son âge. Habillée sans fioritures, elle donnait une impression étrange à Carl, à la fois amusé et intrigué par la personne en face de lui.
-Vous...étudiez ici ? lui demanda-t-il après un instant d'hésitation.
-Il n'y a pas d'âge pour apprendre, galopin, répondit-elle avec un rire alors qu'elle l'entrainait hors du hall. Plus sérieusement, oui, je suis étudiante en biologie. Un de mes anciens thésards s'est retrouvé ici et il a suggéré mon nom. Alors je découvre les merveilles de notre galaxie, et avec un peu de chance, je pourrai même faire une ou deux découvertes intéressantes avant de finir en maison de retraite.
Elle se tut un instant en arrivant à un croisement puis lui fit signe de le suivre vers un ascenseur.
-Enfin, reprit-elle, assez parlé de moi. On t'a un peu présenté la situation, non ?
-A peine, dit le jeune homme en rentrant dans la cabine.
-Le général te fera un topo à toi et aux autres lors de son discours. Mais en gros, on est pas seuls dans l'univers, et de très loin, affirma-t-elle d'un ton léger, en appuyant sur un des boutons du panneau de sélection. Les Américains sont tombés sur un objet extraterrestre appelé Porte des Étoiles, qui permet de se balader à travers tout un réseau à l'échelle galactique. Ils ont appris à l'utiliser il y a un peu plus de vingt ans, et maintenant...on a une énorme base lunaire, des vaisseaux spatiaux, des centres de recherche et je ne sais quoi encore.
-Et qu'est-ce qu'on étudie, ici, à part la biologie ?
-Tout.
Les portes s'ouvrirent et le duo sortit avant que Carlotta ne continue :
-Alors, pour ne citer que les sujets étudiés par mes voisins, physique des vortex, cultures extraterrestres, sciences politiques, tactiques militaires, et j'en passe. Je ne crois pas qu'il y ait un sujet dont on peut se passer, en fait.
-Mais, il y a combien de personnes ici ?
-J'ai pas de chiffre précis, mais je dirais quelques dizaines de milliers. Le recrutement est de plus en plus large, en fait. Enfin, tu verras ce que je veux dire à midi, quand toute ta promo sera rassemblée pour la première fois.
La réponse donnée sur un ton à peine plus sérieux, déstabilisa le jeune homme, alors qu'il continuait à suivre sa nouvelle marraine.
-Mais, demanda-t-il brusquement, s'il y a tant de personnes que ça ici, comment ça a pu rester secret ? C'est pas croyable, une conspiration aussi grande sans fuite.
-Hé hé, lui répondit-elle doucement. Il suffit juste que les bonnes personnes marchent avec nous pour éviter presque toutes les fuites.
-Non, je veux dire, les journalistes, les politiciens, les militaires, les techn...commença-t-il avant de réaliser. Non !
-Si, si, presque toutes les personnes se rendant compte par elles-mêmes de ce qu'il se passe reçoivent leur invitation. Ensuite, vu les moyens du Programme, c'est presque impossible de réussir à diffuser l'information à grande échelle sans passer par quelqu'un au courant, qui s'arrangera donc pour mettre une...rustine.
-Mais avec Internet, et...
-Moi aussi, je pensais ça quand je suis arrivée, mais en fait, on a des gars dans presque tous les majorité des fournisseurs d'accès moteurs de recherche pour contrôler les infos.
Carlotta ouvrit une porte et lui fit signe de rentrer.
-Voici tes quartiers, Carl.
La pièce était légèrement exigüe, mais disposait néanmoins du mobilier de base, du lit au bureau, sans compter une fenêtre donnant sur un paysage marin. Sans faire attention à ses affaires déjà rangées dans l'armoire ouverte, le nouvel étudiant s'avança lentement vers celle-ci, et avança sa main jusqu'à la toucher. Il se retourna ensuite, et s'adressa à Carlotta, qui était restée sur le pas de la porte.
-Je croyais qu'on était sur la Lune...c'est un écran, c'est ça ? demanda-t-il en réalisant la nature de la "fenêtre".
-Oui, lui dit-elle, on diminue les risque de claustrophobie, et puis en plus on a un meilleur choix de paysage que sur Terre.
-OK, donc, je loge ici pour, quoi, deux ou trois ans ? Et j'ai cru comprendre que je pourrai revenir sur Terre de temps à autre, non ?
-Bien sûr, on n'est pas prisonniers ! répondit-elle avec force. Mais je crois que tu ne reviendras pas trop la première année.
-Comment ça ?
-Tout le monde cherche à en savoir autant que possible sur ce qu'on fait dans le coin. Résultat, on voit les nouveaux aux quatre coins du complexe en train de fouiner et d'admirer le premier générateur à naquadah venu comme votre Tour Eiffel.
-Générateur à quoi ?
-Laisse tomber. Tu découvriras ça le moment venu. On a quelques heures, et il faut que je te fasse faire le tour du propriétaire avant le discours...
3 ans plus tard
Jetant un coup d'œil à son uniforme, Carl franchit la porte du mess. Il adressa un bref signe de tête à la patrouille qu'il croisa dans le couloir, et reprit son chemin vers le département d'ingénierie aérospatiale. La zone dans laquelle celui-ci était situé appartenait à la section militaire de l'Académie, et il dut donc s'identifier au niveau du check-point principal. Celui-ci franchi, il décida de faire le reste du chemin à pied plutôt que de se servir du tramway interne. Il lui restait un bon quart d'heure avant le début du cours et son expérience lui disait qu'une douzaine de minutes étaient nécessaires pour atteindre à pied la salle.
Ainsi, après un peu plus de onze minutes, il arriva en vue des autres aspirants-pilotes qui se rassemblaient près de l'amphithéâtre. Les rejoignant, il n'eut pas le temps de se lancer dans les conversations que la porte s'ouvrit, invitant les élèves.
A l'intérieur de la salle se trouvait un objet métallique tubulaire de plusieurs mètres de long, que Carl et les autres aspirants reconnurent immédiatement. Le propulseur ionique était l'un des composants centraux des appareils légers terriens. Il s'assit alors au second rang et sortit son carnet de notes, tandis que l'un des ingénieurs de l'équipe de conception s'approchait des élèves pour présenter la machine complexe...
Au bout de quatre heures, le moteur avait laissé place à une version éclatée de la tuyère de sortie, présentée de manière à attirer l'attention sur les accélérateurs finaux. Après un dernier exposé sur le système d'origine Serrakin, l'orateur fit disparaître l'hologramme et invita son public à poser d'ultimes questions. Alors que certains descendirent le voir, tenant leurs notes à la main, Carl se leva et suivit la majorité du groupe vers la sortie de la pièce puis vers le tramway le menant vers la zone d'habitation.
S'il avait déjeuné avec des connaissances étudiant dans des domaines civils, il choisit de se joindre aux autres aspirants pour le dîner et, après celui-ci, resta discuter avec quelques amis, avant de repartir dans son studio.
Il se coucha une heure plus tard, ses notes revues et enregistrées dans son ordinateur, et éteignit la lumière, alors que dans la fenêtre virtuelle le Soleil achevait de se coucher sur les montagnes, dévoilant un ciel nocturne parfaitement dégagé et privé de tout éclairage parasite.
Six ans d'études pour en arriver là... Quel foutoir ! C'est clair qu'elle ne m'avait pas menti : c'était une belle opportunité, mais il y a des jours où on se demande si ça n'aurait pas été mieux de ne rien savoir. Les Jaffas, les réplicateurs, les Goa'uld, l'Alliance Luxienne, sans même parler des mercenaires de tous bords qui jonchent la Voie Lactée... Et on est sensé assurer la sécurité de tout le monde là-dedans ?
Enfin, je devrais être content des avantages, mais quand même...est-ce que ça en valait le coup ?
Le lendemain matin, 0750 GMT
De la vingtaine de personnes présentes, il n'était pas le seul militaire, mais bien le seul aspirant-pilote du lot. Sortant son ordinateur de poche, il jeta un dernier coup d'œil à la fiche qui lui avait été fournie deux jours auparavant. L'homme était un généticien dont la thèse lui promettait un avenir exceptionnel au sein de la communauté scientifique terrienne, mais surtout une place dans le Programme.
Francis Simmons..., 26 ans, université de...bah, aucune importance, désormais.
Il éteignit le petit écran et redressa la tête pour observer le petit groupe qui se renforçait après chaque téléportation. Carl sourit en reconnaissant le visage éberlué qui lui rappela sa propre réaction lorsqu'il avait fait partie de ce groupe.
Le sergent Andul le croisa, leur adressa un petit salut avant d'effacer son habituel sourire pour le remplacer par la mine renfrognée qu'il réservait aux nouveaux.
Oui, ça en vaut probablement le coup