Et voilà le chapitre 14. La fin approche. Encore un chapitre et le Tome I sera fini.
Berf c'est la suite direct du chapitre 13 et prépare le Tome II en douceur en apportant pas mal d'infos. Un chapitre court, avec peu d'actions mais important pour l'organisation du Tome II.
Voilà bonne lecture !
Chapitre 14 : Retour au Bagne
Base aérienne 117 – Paris – Mardi 23 avril 2013 – 10h30
Le bruit des pas se faisait entendre jusque dans le bureau du général Dumarchais. Se rapprochant à grande vitesse du bureau de l’officier, l’homme croisa le lieutenant Jérôme Cahors, qu’il salua longuement tout en débutant une conversation des moins passionnantes. Parlant du temps qu’il faisait aujourd’hui, des bouchons sur le périphérique francilien, lui demandant comment il se portait avant de mettre lui-même fin à la conversion. Une conversation où le lieutenant n’avait même pas pu prendre la parole, ce qui arracha un sourire à Dumarchais qui avait reconnu qui se cachait derrière ce drôle de personnage.
Toc-toc-toc, se fit entendre sur la porte du bureau
-Entrez monsieur De Beaune – annonça Dumarchais
-Général, bien le bonjour – lui renvoya l’homme en fermant la porte
Il s’assied dès que le général lui en donna la permission. Une permission relevant plus de la politesse que d’une quelconque autorité. Le réel chef entre ces deux hommes était bien Patrick De Beaune. Et ils le savaient tous deux pertinemment.
De Beaune sortit d’une mallette quelques dossiers en prenant tout son temps, sous le regard anxieux et impatient du général. Puis pour faire durer le plaisir, il commença à vouloir parler du temps qu’il faisait en ce mardi matin, des bouchons sur le périphérique ... mais Dumarchais l’arrêta net.
-Bon monsieur De Beaune ! Je vous en prie venez-en au fait !
-Eh bien général – le diplomate arborait un grand sourire – A quoi vous attendiez vous ? Bien sûr que le poste est pour vous !
-Le poste de … ?
-Le poste de général en chef du programme militaire spatial français. Félicitations général ! – il tendit une note confidentielle du premier ministre au général Dumarchais
-Ah et bien – il était très soulagé par ce verdict – c’est une très bonne nouvelle pour moi je présume.
-Allons donc général, il ne fallait pas s’en faire. Je suis un homme de parole. Vous êtes récompensé pour vos efforts. D’ailleurs c’est aussi le cas de mademoiselle Riveron. Elle sera votre alter ego civil sur ce programme.
-C’est vrai ? Et en quoi consistera son commandement ?
-Son … commandement … comme vous le dites se dénomme le GIRP. Groupement Industriel de Recherche dans Pégase. Je sais, le nom n’est pas très attrayant, mais bon vous connaissez les technocrates.
L’implication des industriels de la défense français dans certains travaux du CIS avait poussé le gouvernement à inclure dans le projet les grandes entreprises du secteur. Seulement il était hors de question pour l’Etat que les groupes privés aient un quelconque contrôle sur les actions entreprises par le programme. La hiérarchie était claire. L’Etat était le maître d’œuvre unique du projet. Il en relevait de sa défense stratégique.
Il fallut donc déterminer les rôles, fonctions et limites des différents acteurs. Le programme était pour l’instant dirigé par le Premier ministre. Une mesure qui faisait grincer des dents et qui ne pouvait être définitive. Le président, porteur de la seule légitimité universelle, avait officieusement délégué ce pouvoir à son Premier ministre qui avait montré une certaine aptitude sur ce dossier sensible. Mais le corps législatif ne pouvait pas être mis au ban du programme. En attendant, pressé par la nécessité de mettre sur pied un corps militaire expéditionnaire dans les plus brefs délais, cette hiérarchie restait, faute de mieux, en vigueur.
A l’échelon inférieur, on décida de séparer l’action militaire de l’action civile suivant la méthode américaine. Un groupe civil public, le GIRP, était chargé de diriger les recherches scientifiques et les applications possibles des technologies et savoirs qui s’apprêtaient à être glanés. L’enjeu étant de parvenir à une indépendance stratégique, au moins partielle en matière d’armement et de technologie.
Une proximité avec l’armée était bien prévue. D’abord comme un partenariat exclusif. Le GIRP n’étant qu’une sous-division de la DGA, la Délégation Générale de l’Armement, avec des champs d’actions plus vastes. Puis aussi par une « armée de servitude » comme l’affirmaient certains détracteurs. La force armée se chargeant de la protection du GIRP, mais aussi de son approvisionnement en « matière », qu’elle soit matérielle ou immatérielle. Et pour le moment, l’armée tenait ce rôle sans problème avec la capture de la navette wraith en Lorraine. D’autant que les renseignements alors détenus sur Pégase ne tenaient que dans les dossiers mis à disposition par les Etats-Unis. Il ne faisait aucun doute que ces dossiers avaient été épurés selon les volontés du Pentagone. Pour être un minimum efficace et utile, le programme français avait besoin de monter son propre réseau de renseignement, parallèlement à celui de son allier.
-Je vois. Content pour elle. Et quand est-ce que ma nomination sera effective ?
-Dans une semaine. L’Etat-Major se réunira et annoncera les affectations. En attendant vous êtes officieusement en service.
-Ah – le général fut plus que surpris – et bien sauf votre respect peut-être serait-il temps de me prévenir.
-J’y viens général, j’y viens. Ne soyez pas si pressé – Patrick chercha un autre document et continua la conversation en changeant de sujet – et sinon vos hommes d’Egypte, ils se sont réhabitués à la vie normale ?
-Si pour vous passer des journées entières cloîtrées dans une cellule de la DGSE est une vie normale alors oui ils vont bien.
-Tant mieux car ils n’y resteront probablement pas bien longtemps – il ouvrit enfin le bon dossier – Bon alors voilà le topo.
Patrick De Beaune, qui était devenu le responsable du programme auprès du Premier ministre, commença à détailler les évènements à venir. La France marchait main dans la main avec les Etats-Unis. Et ces derniers avaient eu l’idée de monter une opération franco-américaine. Celle-ci aurait pour cadre l’antique cité d’Atlantis.
Cette dernière se préparait activement à un retour dans la galaxie de Pégase. Le Pentagone avait longtemps hésité sur le statut de la cité. Mais celle-ci semblait créer trop de problèmes diplomatiques sur Terre. De même la situation géostratégique dans Pégase évoluait plus vite que ne l’avait prévu les responsables du Homeworld Security. La relance de missions d’explorations et d’une présence militaire et civile au long terme passait comme nécessaire. Les mauvaises langues, elles, avançaient que la raison du départ d’Atlantis était tour autre. Avec le développement de la menace luxienne, cristallisée par le scandale du Destiny où un militaire américain, le colonel Telford, avait été retourné par des agents luxiens. La fin du CIS donnait aux américains la possibilité de réformer leurs forces attachées au programme Stargate. Et Atlantis faisait partie de ces forces. La cité d’Atlantis avait vu sa charge d’activité et ses crédits baisser au fil des mois. N’étant plus menacée par les wraiths, elle n’était plus une priorité aux yeux du Congrès. De même la recherche scientifique présente sur la cité avait été détournée auprès du SGC pour mener à bien la mission Icarus.
Mais la mission Icarus fut un échec cuisant. Elle avait nécessité des ressources considérables. La première planète Icarus n’était plus qu’une planète volcanique sans vie comparable à la Terre des premières années. Le Destiny, lui, n’avait plus donné de contacts depuis deux ans. L’Alliance Luxienne jouait encore et toujours plus un jeu politique compliqué dans la Voie Lactée que personne sur Terre n’avait réussi à définir. Le George Hammond, dernier né des croiseurs de classe Deadalus, servait de banc d’essai pour des technologies alors que son rôle de navire de soutien pour la mission Icarus avait pris fin en même temps que cette dernière. Inadapté pour cette mission, son potentiel avait été gâché aux dires du colonel Carter qui aurait préféré qu’un vaisseau plus modeste, comme l’avait été le vénérable DSC-303 Prométhée, serve pour ce rôle.
Ainsi les Etats-Unis se devaient de rénover leur engagement spatial. Le processus était sur de bonnes voies avait assuré Richard Woolsey à Patrick De Beaune. Les états-uniens avaient décidé de redonner à Atlantis son rôle initial. Celui de base scientifique et militaire terrienne dans la galaxie de Pégase. En attendant les américains rattrapaient comme ils le pouvaient le temps perdu en lançant un nouveau croiseur de la classe Deadalus. La fin du Conseil International de Surveillance les avaient conduit à se réapproprier complètement leurs unités, notamment spatiales. Le CIS avait nommé cette classe de vaisseau du numéro de la première unité. Le Pentagone, sous la pression de l’US Navy qui lorgnait sur le programme, revint en premier sur ce qui semblaient pour eux une erreur. Si bien que l’arsenal comprenait maintenant le Deadalus (DSC-304), l’Odyssey (DSC-305), l’Apollo (DSC-307) et le George Hammond (DSC-309). Les numéros 306 et 308 étant rayés de la liste car étant ceux de l’ex RFS Korolev (détruit) et du PLA Sun Tzu, dorénavant propriété de la Chine.
-Comment les américains ont-ils réussi à mettre la main sur Atlantis après le départ du CIS ?
-Ils ont posé leurs grosses bottes dessus. Tout simplement. Le secteur civil international devrait toujours être présent. Mais l’oncle Sam en fait son terrain de chasse gardé. Leur promesse de transfert de technologie est une arnaque. Nous le savons depuis longtemps. Raison pour laquelle nous n’avons jamais perdu de moyens dans cette entreprise. L’engagement de notre secteur privé auprès du CIS étant toujours calculé pour être le plus rentable possible en termes de retombée technologique et financière pour notre pays.
-Donc nous n’enverrons pas d’ingénieurs du GIRP là-bas ?
-Non. Des soldats suffiront à bien nous faire voir. Et de la sorte nous n’aurons pas de fuite de cerveaux dans cette affaire.
-Je vois. Et comment vont-ils faire pour retourner dans Pégase ? – demanda Dumarchais
-Et bien grâce aux EPPZ que nous leur ramenons. Ils en ont déjà un. Celui qui équipe le croiseur Odyssey. Il dispose de 74 % de sa puissance il semblerait. Les nôtres disposent de 96% et 1.2%. Ils auront donc de quoi repartir dans Pégase et assurer la pérennité de la cité une fois là-bas.
-Et en retour nous n’avons qu’un gros chèque et le droit d’envoyer une vingtaine d’hommes à leurs côtés ? Vous êtes sûrs qu’on a fait une bonne affaire ?
La question était directe mais légitime. Elle s’était aussi posée au gouvernement avant la transaction. Mais au final, l’option de la vente avait été retenue. De même, la porte des étoiles en France parasitait lors de son utilisation l’autre porte. Il fut donc convenu que la France n’utilise qu’avec parcimonie son nouveau moyen de transport. Cette règle, informelle, était l’une des raisons de la prochaine mission sur Atlantis. Intégré la France au programme Stargate américain, c’était s’assurer de garder l’état européen sous contrôle. La découverte de la porte française avait été une mauvaise nouvelle pour les Etats-Unis. Mais heureusement pour eux, elle était endommagée et ne fonctionnait que par un rafistolage d’origine wraith qui n’apportait pas les conditions de sécurité minimum pour une utilisation intensive. Et les américains ne voyant pas la France remettre en état la porte, ils s’assuraient un contrôle presque exclusif des allées venues sur Terre. De son côté, le gouvernement français disposait d’une manne financière suffisante pour son programme. De plus il comptait bien surprendre le monde entier en rendant la porte de Loraine totalement fonctionnelle.
La discussion s’était terminée sur les derniers détails du « cahier des charges ». Le général disposait d’un nombre réduit d’accréditation pour cette mission. Le choix du commando fut donc vite trouvé. Le commandant Loïc Varrault était attendu en début d’après-midi. Un briefing s’imposait.
L’après-midi dans le même bureau, en compagnie du commandant Varrault …
-J’accepte mon général !
-Parfait – Dumarchais était ravi de l’état d’esprit du commandant Varrault - Je n’ai jamais douté de votre engagement. Nous pouvons passer à l’élaboration de votre équipe.
-Mon général si nous n’avons que peu de membres à envoyer, je propose d’établir une équipe vraiment légère. Moins de dix hommes me paraissent suffisants.
-Très bien commandant – reprit Dumarchais, assis sur le bureau en face du soldat d’élite et tenant une liste préétablie par Varrault – Alors voyons voir ça.
Le général entreprit la lecture du dossier remit par le commandant. Passant en revue le profil des membres. S’arrêtant à chaque nom pour demander des précisions à son subordonnée, assis sur une chaise devant le bureau.
-Lieutenant Thierry Guichard, 1er RPIMa. – lut le général Dumarchais - C’est votre fidèle équipier si je ne m’abuse ?
-Effectivement. Autant vous dire que j’accomplirai cette mission uniquement s’il me seconde.
-Je n’y vois aucun problème. Ses états de service sont sensiblement équivalents aux vôtres. Aspirant Ludovic Berson, 1er RPIMa. – Alexandre, quelque peu désabusé, releva la tête pour questionner Varrault de nouveau – Un élève officier ? Vous êtes sérieux ?
-Je sais – il se racla la gorge avant de continuer – ça peut paraître risqué. Mais c’est un élève que je suis personnellement. Il est relativement âgé et expérimenté vis-à-vis de ce qui se fait dans l’armée …
-Vingt-neuf ans – l’interrompit Dumarchais – C’est plutôt très âgé pour un élève officier.
-… Ecoutez, c’est l’un de mes meilleurs éléments. Il est vif, efficace et ne demande qu’à prouver ses capacités.
-Hmm … soit. Va pour Berson. Ensuite, caporal-chef Martin Gaboriot, CPA 10. Il n’est pas de votre unité ?
-Cela ne m’empêche pas d’avoir pu le superviser avec le COS. Ses aptitudes de sniper ont sauvés beaucoup d’hommes en Afghanistan. – répondit le militaire
-Ok et le dernier. Caporal-chef Mathieu Michelet, 1 er RPIMa. Bon et bien on a fait le tour.
Le général marqua une pause, les yeux toujours rivés sur le document. Varrault le regardant sans prendre la parole.
-Toutefois cinq membres c’est assez peu tout de même. J’étais d’accord pour moins de dix membres. Mais là notre détachement est trop réduit.
-Et bien, si vous y tenez je peux trouver un autre soldat. Nous serons alors six, ce qui est réglementaire dans beaucoup de commandos dans le monde …
-Non et puis, vos hommes sont de très bons soldats, mais ils n’ont pas d’aptitude particulière pour cette mission.
-Pardon mon général ?
-Je veux dire qu’il manque une capacité à votre groupe. Je vais rajouter à cette mission deux hommes et une femme. Le lieutenant de vaisseau Karmen Le Guelen des commandos marine, le lieutenant Antoine Estienne de l’Armée de l’Air et le sergent Damien Delcourt du génie.
-Mais !
-Ils apporteront un petit plus à votre équipe.
-Mon général, je suis obligé de refuser.
-Quoi ? – Dumarchais changea littéralement de ton pour devenir agressif. Ce que fit son interlocuteur en dépit de la différence de grade
-Je les connais, je les ai secourus en Egypte. Ils ne sont pas aptes à une mission de guerre.
-Ils ont brillamment réussi leur mission en Egypte et en Allemagne sans y être préparé. De même que nous leur devons beaucoup lors de l’attaque wraith.
-Général, c’est totalement différent. On parle là d’une autre galaxie remplie de ces troupes extraterrestres de force surhumaine et de cruauté dépassant les plus grands criminels du XX ème siècle. Ils ne sont pas faits pour ça.
-Commandant ! Le lieutenant de vaisseau Le Guelen est celle qui nous a permis de découvrir la présence des wraiths sur notre territoire. D’ailleurs j’ai là votre évaluation sous mes yeux. Vous dites clairement qu’elle est un soldat de qualité, habilitée aux missions à plus haut risque !
Varrault était pris à son propre piège. Il avait, sans anticipé les conséquences, évalué plusieurs membres de la dernière mission en Égypte pour le compte du général Dumarchais. Il avait même prit part aux interrogatoires de la DGSE la semaine passée. Et en effet, il avait rendu des avis positifs sur la plupart des individus. Reconnaissant leur sang-froid, capacité à faire face à l’inconnu et force mentale. Mais il ne s’attendait pas à les retrouver pour une mission extraterrestre. Le général continua à défendre ses choix.
-Delcourt est un soldat expérimenté, rompu au théâtre afghan et spécialiste technique qui vous sera utile dans Pégase. Quant à Estienne, c’est un pilote de chasse qui a démontré sa polyvalence. Il sera utile pour des essais d’aéronefs sur Atlantis. Comme vous le voyez commandant, j’ai entièrement confiance en eux comme vous avez confiance en vos hommes. Ils ont parfaitement répondu à mes attentes. Donc ils feront partie de votre équipe point final.
-Bien mon général. – se résigna Varrault - J’aimerais avoir votre accord pour parfaire l’entraînement et la cohésion de cette équipe.
-Eh bien vous devez être le vendredi 3 mai aux États-Unis. Cela vous laisse donc un peu plus d’une semaine. Je ne vois pas d’objections à ce que vous preniez votre équipe en main dès maintenant.
-Dans ce cas je ne vois qu’un endroit pour le faire … –le militaire se mit à sourire sournoisement
Le briefing terminé et Varrault reparti auprès de son équipe, le général Dumarchais terminait sa longue journée administrative. Il était 18h passé, les embouteillages seraient multiples, il ne rentrerait probablement chez lui qu’après 20h. L’homme divorcé qu’il était n’avait personne qui l’attendait chez lui. Il pensa à ce qu’il pouvait faire cette soirée. Aller boire un verre avec des amis. Il oublia bien vite cette opportunité. Il comptait ses amis sur les doigts de la main dans cette ville. Et de toute façon il n’aurait pas grand-chose à leur dire. Sa vie se résumant ces dernières semaines à une succession d’évènements tous plus secrets les uns que les autres.
Il pensa à s’entourer de la compagnie d’une femme. Hortense Riveron ne l’avait pas laissé insensible et il n’aurait pas de mal à arranger une rencontre. Mais il revint sur ses pensées, aussi douces soient-elles, par professionnalisme. Il n’avait pas le droit à l’erreur. Il mit de côté son attirance pour Hortense en attendant des jours meilleurs. Dieu que la vie était difficile. Il était général, mais n’avait pas l’impression de commander quoi que ce soit. Entre son supérieur officieux, De Beaune, en qui il n’avait aucune confiance, et son supérieur officiel, le chef d’état-major des armées, qui le détestait copieusement, son champ d’action n’était définitivement pas ce qu’il attendait.
Cette crainte de n’être qu’un pion lui attira très vite l’idée qu’une bataille se jouait peut-être autour de son nom. Après tout, Dumarchais était détesté par l’état-major et ne devait son salut qu’au pouvoir politique. Si l’armée décidait de faire entendre ses revendications, il devenait le parfait terrain de jeu. Sa nomination serait le moment rêvé pour l’armée de se faire entendre. Il voulut se persuader qu’il n’avait rien à craindre, que le gouvernement le soutenait et qu’il se faisait des films. Malgré tout, et si c’était vrai ? Si l’armée n’attendait que sa nomination pour établir un bras de fer ? Sa tête l’emporterait-elle sur toutes les autres ?
Il avait besoin d’une réponse. Il connaissait déjà celle de De Beaune, il n’avait donc rien à tirer de ce côté-là. Mais une personne pouvait lui rendre ce service. Après quelques minutes passées à ouvrir une liaison sécurisée avec le camp de Cercottes, le général pu s’entretenir en toute confidentialité avec son interlocuteur.
-Général ?!?
Kanbeï fut surpris par l’appel. Il avait été clair dans sa dernière entrevu téléphonique. Il avait catégoriquement refusé la mission franco-américaine. Il n’avait pas nargué les américains au lancement de la mission Icarus pour se retrouver à leur lécher les bottes quelques années plus tard. Il était trop fier pour s’abaisser devant ces impérialistes. Et ce au plus grand désarroi de son ami Antoine qui avait tout tenté pour l’avoir à ses côtés dans Pégase.
Kanbeï se doutait bien que son refus avait marqué les esprits. Antoine, Karmen et Damien étaient parti une heure plutôt. Il se retrouvait seul dans ce camp militaire des services secrets français. En tant qu’étranger non communautaire, son statut était plus que fragile.
-Je suppose que vous êtes maintenant seul à Cercottes.
-Oui.
-Autant vous prévenir qu’il est trop tard pour changer d’avis même si je doute que ce soit le cas. Vous avez décidé de laisser tomber vos compagnons, tant pis pour vous. Non je ne vous appelle pas pour ça.
Le général remuait le couteau dans la plaie. Il s’avait que le japonais ne culpabiliserait pas mais aurait à cœur de montrer l’étendue de talent. Et ce talent Dumarchais en avait besoin.
-Arrêtez votre petit jeu général. Venez en au fait – Kanbeï n’était pas dupe.
-Hmm … je pense pouvoir occuper vos prochaines journées. Ce n’est pas le travail qui manque avec les réparations de la porte des étoiles et les artéfacts wraiths. Mais pour vous laisser cette chance, vous devez me prouver votre fidélité.
-Vous avez un sale boulot à me faire faire ?
-En quelque sorte oui. Mais je suis sûr qu’il sera facile pour quelqu’un comme vous, rompu aux services de renseignement.
-J’accepte ! –répondit instinctivement le nippon.
- ??? Vous ne voulez pas d’abord savoir de quoi il s’agit ?
-Entre nous général, vous n’avez pas de tâches que je ne puisse pas effectuer …
Cayenne (Guyane française) - Mercredi 24 avril 2013 – 9h00
L’A330-200 du vol d’Air France se posa sans encombre sur l’aéroport Félix Éboué de Cayenne. A son bord des touristes, du personnel venu spécifiquement pour le prochain tir d’une fusée Ariane et plus surprenant, huit militaire en treillis. Le chef du groupe se démarquant par ses larges lunettes de soleil. Les militaires restèrent sur le tarmac quelques minutes, le temps que leur matériel soit déchargé des soutes de l’avion. Pour la plupart, ils se demandaient ce qu’ils faisaient en Guyane. Mais le commandant Varrault refusa de leur répondre. Très vite un camion militaire bâché fit son apparition sur le bitume. S’arrêtant à proximité des métropolitains, le conducteur, qui était seul dans le camion, sauta de sa cabine.
Le commandant Roberto Moretti était lui aussi un récent arrivé. Le 2ème régiment étranger parachutiste, dont il faisait partie, était arrivé au début du printemps pour porter main forte à l’autre régiment de la Légion Etrangère, caserné en Guyane, dans la lutte contre l’orpaillage clandestin. Si la jungle n’était pas son habitat natal, il n’était toutefois pas étranger à ce continent. Originaire des bas quartiers de Buenos Aires, cet argentin puisait sa force dans ses origines italiennes. Il avait le visage marqué par le temps. Des sourcils hauts surmontaient des yeux bleus entourant un nez amoché par la vie. Le légionnaire avait beau être moins grand qu’Antoine, il paraissait bien plus féroce. L’aviateur se décala pour laisser le champ libre à Varrault. Les deux commandants se firent face. Les dents serrées et le regard imperturbable. Karmen se demandait si elle devait intervenir au moment où les deux hommes se prirent dans les bras en se tapant sur le dos.
-Ah comme ça fait du bien de te voir Loïc ! – prononça Moretti avec un fort accent argentin
-La même vieux brigand ! Alors ils sont comment ces chercheurs d’or ?
-Ca va j’ai vu pire. Même si je préfère les sables chauds et secs à la jungle dense et humide de Guyane !
-Tu m’étonnes ! Bon, une petite présentation s’impose. Messieurs … dames – dit Varrault en faisant une révérence si bien que Karmen le foudroya du regard – Voici le commandant Moretti du 2 ème REP. Lui et ses hommes font la guerre aux orpailleurs clandestins. Roberto, tu connais déjà Thierry – le susnommé et le légionnaire s’échangèrent un clin d’œil – adjudant Berson, caporal-chef Gaboriot et Michelet, sergent Delcourt, lieutenant Estienne et enfin, notre quota féminin – Karmen respira profondément pour contenir son énervement devant les railleries de son supérieur – le lieutenant de vaisseau Le Guelen. Bien on a fait le tour. Quant à notre présence ici, le commandant Moretti à gentiment accepté de nous aider dans notre préparation …
-Notre préparation ? – souffla Antoine Estienne à Damien Delcourt
-… Estienne ! Un problème ? - lança Varrault.
-Non mon commandant – lui répondit le pilote de chasse.
-J’aime mieux ça. Donc nous allons nous entrainer avec la Légion avant notre départ final pour les USA. Ça devrait vous remuer un peu. Allez, tout le monde dans le camion !
Echangeur autoroutier de Fey – Metz - Mercredi 24 avril 2013 – 20h00
Le convoi du 6 ème Régiment du Génie d’Angers roulait aussi vite que ses machines le permettaient. Mais il était encore loin des cylindrées de marque allemande qui dépassaient aisément la meute de poids lourds militaires. Beaucoup des sapeurs du génie se demandaient ce qui avait pu pousser l’état-major à préférer la route au train sur une si longue distance. Les hommes étaient fatigués moralement. Leur période de manœuvre avait été rallongée de trois semaines. Et ce sans réel raison. Pendant ces trois semaines, les militaires s’étaient tourné les pousses à monter la garde devant un ancien ouvrage de la Ligne Maginot. Ils avaient bien compris qu’on leur cachait quelque chose. Ils n’avaient pas eu le droit de parler à leurs familles pendant plusieurs jours. Puis ils avaient reçu « un complément d’information réglementaire », autrement dit un message pré-écrit par l’armée qu’ils devaient relayés à leurs proches.
Parmi les membres du régiment, tous n’étaient pas logé à la même enseigne. Pour trois soldats, le traitement avait été pire. A cause de ce qu’ils avaient vu, ces soldats n’étaient plus comme le commun des mortels. Ils faisaient partit d’une infime caste de personnes ayant eu un contact avec des extraterrestres. Ce qui leur valu d’être interner, ausculter et débriefer par les services secrets. Le caporal Marc Thiégot et le sapeur Florent Bodinier avaient fini par retrouver leur régiment. Ce qui n’était pas le cas de leur ami, le sergent Delcourt, dont ils étaient sans nouvelles.
Les deux hommes se retrouvaient côte à côte dans la cabine d’un lourd camion TRM 10000 équipé d’une remorque traditionnellement dévolue au transport de véhicule lourd. Florent conduisait et retenait son souffle à chaque fois qu’il passait sous un pont à cause de la hauteur de son chargement, dissimulé sous une large bâche kaki. Marc était chargé de rester à l’écoute de la radio et accessoirement disposait d’un FAMAS chargé, sécurité relevée. Un dispositif qui l’avait mis mal à l’aise au début. Mais le fait de prendre l’air et de se trouver loin des salles d’interrogatoires lui fut vite un immense soulagement. Si bien que pour les deux militaires, le moral était au beau fixe.
-Non mais franchement Snoop c’était mieux avant ! –lança Marc au conducteur
-Moi j’aime bien Snoop Lion. – lui répondit Florent
-Meuh non enfin, t’es fou ! C’était énorme. – le jeune caporal se mit à rapper sans avoir un réel talent – Snoop Dogg, Snoop Doggy Dogg, represent !
-C’est parce que t’aime pas le reggae. – puis changeant de sujet - Eh, je crois qu’on approche de la porte.
-T’inquiète pas pour la route. Suis juste la voiture de devant.
Devant eux s’était insérée une voiture dans le convoi. Derrière eux se trouvaient aussi deux monospaces. Alors qu’à intervalle de quinze kilomètre en avant de leur trajet se trouvait disséminé des motards de la gendarmerie. Les véhicules civils entourant le camion n’étaient pas de simples vacanciers. Il s’agissait d’un dispositif du GIGN. Arme au point et à l’affut de la moindre menace. Plus haut dans le ciel, un hélicoptère suivait le trajet ainsi que plusieurs patrouilles de Mirage 2000.
Arrivé au péage, le convoi du génie emprunta l’Autoroute A4, en direction de Paris et l’ouest de la France. Mais au milieu du convoi, la première voiture banalisée enquilla une autre sortie. Celle de l’autoroute A31en direction de Lyon. Immédiatement le poids lourd de Florent et Marc ainsi que les autres voitures du GIGN empruntèrent la même sortie. Laissant le convoi repartir vers leur garnison alors qu’eux s’enfonçaient dans le sud-est de la France.
-Bon, prochaine sortie à Beaune. – indiqua Thiégot
-Beaune ?
-Ouais là où il y a eu l’accident avec les gosses.
-Nan je veux dire, ce n’est pas comme ça que s’appelle le type qu’on a vu hier ?
-Le Premier ministre ? - demanda bêtement Thiégot
-Mais non idiot ! Pas lui. Le mec venu lui montrer l’engin. Le grand, avec les cheveux gris, qui se la pète.
-Ah lui ! – Marc avait eu une révélation – ouais ! Il s’appelle De Beaune.
Florent, dépité, se tapa le front avec sa main droite. Mais il n’était pas au bout de ses surprises. Marc renchérit.
-Tu crois que c’est un noble ? Genre le compte de Beaune ? Comme le Comte de Bouderbala ?
-Pff … Et ben tu lui demanderas …
La suite dans le -Chapitre 15: Joint Operation La Fayette"Sais-tu que Flaubert voulait écrire un roman sur le néant? S'il t'avait connue, on aurait eu un grand livre. Quel dommage."
-Jep Gambardella, La Grande Bellezza
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