Jaye Davidson

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Jaye Davidson
1968 : Pendant que les pavés lévitent, le flower-power fait rage outre-Atlantique, et les amours interraciales, naguère proscrites, fleurissent. Naît ainsi, à Riverside (Californie), de l'union d'un Ghanéen et d'une Anglaise, le petit Jaye, qui suit bientôt maman vers la verte Angleterre. Elevé dans le comté d'Hertford, Jaye grandit paisiblement, peu doué pour les études et rapidement attiré par les lumières de la nuit londonienne. Gay, si possible, la nuit. Des petits boulots dans des bureaux (chez Walt Disney, entre autres) puis, doué d'habilités (note du webmestre : dérivé de l'anglicisme "ability", qu'on dit capacité in french) artistiques et de penchants pour la mode, Jaye devient assistant sur des défilés. Présent à toutes les soirées un tant soit peu branchées de la capitale, c'est au cours de celle célébrant la fin du tournage d'Edward II, de Derek Jarman, que Jaye se voit poser la fatale question par un directeur de casting avisé: "Ça vous dirait de faire du cinéma ?". Peu enclin à travailler dur et pas du tout branché par un job de movie-star, Jaye se laisse pourtant tenter par les subtilités du scénario de The crying game. Celui-ci raconte les amours d'un ex-terroriste de l'IRA (Stephen Rea) et d'une sculpturale métisse qui s'avère finalement être un chouïa plus viril que prévu. Cette surprise, non divulguée par la presse, aidera à faire de l'intrigant film de Neil Jordan un gros succès au box-office mondial. Jaye est une star très convaincante dans les deux sexes, et une star d'autant plus énigmatique - et demandée qu'il n'a pas participé à la promotion du film. Après un tel coup d'éclat difficilement renouvelable (avec une nomination aux Oscars en tant que Meilleur second rôle à la clé), le comédien en herbe, revenu à Londres, ne s'étonne pas de ne pas voir les offres pleuvoir. D'ailleurs il s'en fiche royalement même si, en dépit des sessions photos qu'il fait ici et là (une pub pour Gap par Annie Leibowitz et du mannequinat pour «The Face» et «Vogue», tout de même), il se retrouve bientôt à pointer à l'ANPE locale. C'est alors que Roland Emmerich a l'idée de faire appel à lui pour le rôle de Râ, dieu du soleil, dans Stargate, inoubliable nanar crypto égyptien. En dépit d'un tournant annoncé dans sa jeune carrière, Jaye fait la sourde oreille. Mais la production le veut absolument, alignant bientôt un million de dollars pour un rôle somme toute très secondaire. Et le mini scandale suscité par les piercings aux seins d'un dieu branché tribal n'empêchera pas le film de faire un gros tabac. On reverra Jaye un an plus tard, entre Christy Turlington et Naomi Campbell dans un document sur la mode, Catwalk, qui ne trouvera pas de distributeur en France. Difficile de savoir ce que Jaye a fait de son million, bien qu'il ait souvent parlé d'une belle maison victorienne qu'il s'achèterait pour y voir grandir deux hypothétiques chiens. Les années 94-97 ne seront hélas pas bien roses pour l'idole des sexuellement indécis, qui écume les centres de désintoxication pendant de longs mois avant de finalement réussir à décrocher. Aux dernières nouvelles, il serait totalement vidangé de substances prohibées, et ce depuis plus d'un an. Mais il semble plus que jamais déterminé à ne pas reprendre le chemin des studios. On peut comprendre : incarner la victime idéale d'un serial killer dans «Millennium» ou la confidente branchée d'un quadra new-yorkais dans un brouet hollywoodien aura toujours moins de charme à paillettes que l'emploi, même temporaire, d'hermaphrodite ou de fils du Soleil.