La voici enfin. Vous l'attendiez depuis longtemps. je suis désolé de vous avoir fait attendre autant. J'espère que ce chapitre vous plaira. Il m'a demandé beaucoup de temps. Pour chaque heure d'écriture je passais 5 à 10 heures de recherches. Aussi bien techniques que scénaristiques. J'ai tenté de prendre en compte les différentes remarques que j'avais eu. J'ai gardé mes points forts (suspens, véracité technique, dialogues etc). et j'ai tenté d'améliorer le style du mieux que j'ai pu. Le chapitre est assez irrégulier car il a été écris sur une très longue période (7 mois). Vous allez me dire que c'est beaucoup et je suis d'accord. La vitesse d'écriture est mon plus grand point faible. Bref j'espère que vous aimerez! N'hésitez pas à commenter!
***************************************************************************
Chapitre 6: Nouveau départ
PA Charles de Gaulle – sud de la Sicile – Vendredi 14 avril 2013
Les hommes couraient dans tous le sens. On aurait dit qu’ils avaient perdu l’habitude. Pourtant le pacha avait insisté pour garder les marins sur le qui-vive. Les exercices s’enchainaient à un rythme élevé. Marin-pompiers, armuriers, commandos, mais surtout rampants. Ces derniers étaient chargés de la mise en fonction du pont d’envol. Il n’y avait aucune place à l’improvisation. Tel un ballet des plus grands opéra les marins du pont d’envol effectuaient leurs taches respectives avec un minutage précis et sans failles. Leurs gilets de couleurs désignaient leur appartenance à des groupes précis : armuriers, équipe de décollage …
Et en ce matin ensoleillé du printemps méditerranéen, c’était l’équipe d’appontage qui était mobilisée. Les hauts parleurs de l’ilot avaient renseignés les équipes. 4 rafales étaient en approche. Appontage imminent. Les marins étaient joyeux. Après le dur calvaire de la bataille d’Ouessant, leurs pilotes revenaient enfin à bord. Le premier à se présenter était le capitaine Béllion. Sonic, comme il était appelé, était le pur pilote académique. Ses stats étaient incroyables. 80% de taux de réussites à l’appontage du premier coup. Et il n’allait pas les faire mentir. Dès son premier passage, il posa son rafale selon le parfait angle et la bonne vitesse, lui permettant au passage d’accroché les solides brins d’arrêt. A peine stoppé, l’avion était détaché et remorqué loin de la piste d’appontage. Cette mesure de sécurité était nécessaire pour dégager le pont d’envol dans l’axe de la piste. Elle permettait aux pilotes ne réussissant pas à accrocher les câbles d’arrêts d’acier de remettre les gaz pour repartir du porte-avions. Le second de Sonic, Jade, eu besoin de ce « touch and go ». La jeune pilote du s’y reprendre à trois fois pour enfin poser son chasseur omnirôle sur le porte-avions. Mais au final tous les chasseurs purent rejoindre leur berceau. Le Charles de Gaulle qui sortait d’un court débriefing en Italie était de nouveau opérationnel avec 4 rafales F3 catapultables à tout moment.
http://www.youtube.com/watch?v=xgaXNiIK9G8
JT du 20h de France 2 – Vendredi 14 avril 2013
« Revenons sur ce drame qui a touché la marine française. On en sait maintenant plus sur le déroulement des évènements. Le président a tenu une conférence de presse ce matin à Brest ou il a confirmé qu’il ne s’agissait pas d’une attaque terroriste. Les conclusions de l’enquête dévoilées par le président sont les suivantes. Jeudi de la semaine dernière à 6h45 heure de Paris, une météorite est rentrée dans l’atmosphère avant de se désintégrer au contact de l’Océan à plus de 1300 km des côtes. Après, tout s’est passé très vite. Une demi-heure plus tard, la flotte française qui se trouvait en manœuvre dans l’océan Atlantique a été frappée par un très violent tsunami. On fait état de vagues de plus de 15 mètres. Certains navires présents n’ont pas résistés à la force de la déferlante. Sur place à Brest, notre correspondante Maryse Burgot. Alors Maryse bonsoir, qu’en est-il ici à Brest après la révélation de l’enquête sur ce terrible drame ?
-Bonsoir David. Et bien ici à Brest c’est la tristesse qui règne, mais aussi la surprise. De mémoire de marin en Bretagne, jamais un tel phénomène n’avait eu lieu. Les familles sont désemparées. Le gouvernement a mis en place une cellule d’aide psychologique très importante. La plus grande depuis la tempête de l’an 2000. Toutefois les spécialistes s’accordent pour dire que le pire a été évité ce jeudi. En effet le tsunami a vite perdu de son intensité pour finalement disparaitre avant de toucher la côte. Les pertes auraient pu être beaucoup plus graves. Et ici les tsunamis du Japon et d’Indonésie sont restés dans la mémoire collective. Quant au discours du président, et bien les avis sont mitigés. Mais au final les familles devraient pouvoir faire leur deuil avec le rapatriement des corps dans les jours à venir.
-Bien merci Maryse, vous étiez en direct de Brest. Autre titre de l’actualité, c’est demain que les opérateurs de télécommunication français devront s’expliquer devant la commission européenne de Bruxelles. De graves soupçons pèsent sur une affaire de monopole qui fait suite à la panne générale des télécommunications apparue jeudi 6 avril … »
Aéroport Roissy - Charles de Gaulle – 15 avril 2013
Antoine se sentait mal. Ce n’était pas physique, il était juste embarrassé. Il sortait tout juste d’un très long débriefing de plus de cinq jours non-stop. Mais les choses n’étaient pas prêtes de se calmer. Alors qu’il avait réussi à se montrer indispensable, du moins il le pensait, au général Dumarchais, voilà que ce dernier était déjà victime du manque de rigueur du jeune officier. Le vol en provenance de Tokyo était arrivé depuis près d’une demi-heure. Il y avait maintenant des touristes nippons dans tout l’espace d’arrivée. Le pilote, le général et son aide de camp attendaient inlassablement l’arrivée du prodige japonais. Antoine Estienne s’était battu pour le faire intégrer dans l’armée française, non sans difficultés. Et maintenant Kanbeï se faisait attendre. Le général, lui, était silencieux, il refusait tout dialogue depuis ce matin.
Il pensait à autre chose. L’armée était en train de changer en interne. Il y avait une place à prendre. En attendant, il restait aux commandes de l’enquête. D’abord censée répondre à la menace wraith, elle avait maintenant pour but de répondre à la question : d’où vient la porte ? Un sommet secret était prévu ce soir à Paris. Le CIS était le maître de cérémonie. L’enjeu n’était pas tant de savoir à qui appartenait la porte dans le passé, mais à qui elle appartiendrait dans le futur. Sur ce point, Alexandre était très pessimiste. La France n’avait pas les moyens d’un tel programme. Et pourtant elle ferait tout pour garder l’engin. Le traumatisme était trop grand. On était passé à deux doigts de la mutinerie générale. Le premier ministre avait rassuré les militaires en arguant que la porte ne serait pas vendue …
Ce choix politique de tout faire pour garder la porte était la raison de la venue de Kanbeï. Le général avait pu découvrir son talent lors de ce que l’on appelait maintenant la bataille de l’Est, en opposition avec la bataille d’Ouessant. La France allait avoir besoin d’atouts supplémentaires dans sa nouvelle lutte. Le jeune hacker ne serait pas de trop. En plus il n’était pas intéressé par l’argent. Mais son anti-américanisme primaire deviendrait surement une source de problèmes dans le futur. Bref Dumarchais n’avait en réalité confiance en personne. Il doutait sérieusement de Patrick De Beaune et de son second, Hortense Riveron. Il ne pouvait pas non plus se fier à l’armée. Aucun de ses hommes de confiance n’avait été accrédité. Il devait faire avec les moyens du bord. Et les seuls moyens dont il disposait étaient ce pilote de chasse et son acolyte asiatique qui se faisait attendre.
Alors qu’il commençait à perdre patience, Alexandre aperçu un jeune homme asiatique correspondant à la description de l’intéressé. Il fit signe à Antoine qui confirma tout heureux que c’était bien Kanbeï. Le trio s’avança près d’un portique de sécurité pour accueillir le japonais. Kanbeï et Antoine échangèrent un léger regard complice. Les deux hommes étaient manifestement contents de se revoir après l’épreuve qu’ils avaient vécue. Dumarchais pu enfin dire quelque chose.
-Monsieur Takeukhi, bienvenue en France. Au nom de l’état français, je tiens à vous remercier pour votre aide précieuse dans la résolution de cette crise.
-Général Dumarchais je suis enchanté de faire votre connaissance.
Répliqua le japonais dans un français parfait.
-Bien nous sommes pressés par le temps. Nous avons réquisitionné un hélicoptère. Mon chauffeur s’occupera de vos affaires et les apportera à votre nouveau domicile.
-Heu attendez. J’ai quelque chose de précieux dans mes affaires que je ne veux pas laisser sans surveillance.
-Monsieur Takeukhi, vous pouvez faire confiance à mon aide de camp. Jérôme est quelqu’un en qui vous pouvez avoir confiance.
Alors que le général tentait d’être diplomate malgré l’urgence de la situation, Kanbeï ne l’écouta pas et s’empara de l’un de ses sacs pour y récupérer un objet. Le général qui le regardait avec attention comme les deux autres français fut terriblement surpris à la vue du sabre brillant que le japonais sortit de son fourreau à l’air libre. Antoine était estomaqué, ce qui le surprenait c’était de savoir comment Kanbeï avait fait pour tromper la douane. Quant à Dumarchais, il n’avait pas besoin de ça, il avait radicalement changé de ton et semblait gêné. Il s’approcha du hacker et posa sa main sur le manche de l’arme.
-Enfin bon dieu virez moi ça ! On est en vigipirate écarlate ici ! Allez en route.
Les militaires quittèrent l’aérogare pour monter dans un hélicoptère spécialement affrété, direction la base aérienne 117 de l’armée de l’air à Paris. La « Cité de l’Air » abritait l’état-major de l’armée de l’air, tous les services d’administration et aussi le commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes. Mais le bâtiment était progressivement vidé, les services devant être incorporés dans un nouveau bâtiment regroupant le ministère de la défense et tous les autres états-majors. Ce nouveau bâtiment prenant le surnom d’Octogone, en référence au Pentagone américain. Ceci permettait de disposer de l’ancien bâtiment tout entier. Il devenait à la fois le PC de Dumarchais et le lieu du sommet du CIS.
Le trajet en hélicoptère fut bref. Dumarchais avait convié Antoine et Kanbeï dans son bureau. Il avait une mission pour eux. Les deux jeunes hommes étaient assis sur des chaises alors que le général, debout, s’appuyait sur son bureau en prenant un dossier. Le briefing serait rapide, il avait peu de temps devant lui.
-Bien monsieur Takeukhi …
-Appelez-moi Kanbeï général.
-J’allais y venir. Nous avons réussi à vous faire venir ici, mais nous n’avons pu officiellement vous intégrer dans les services secrets. Du coup vous êtes intégré à la Légion Etrangère. Lieutenant Takeukhi, officier télécommunication. Mais ne vous en faites pas, c’est bidon. Vous êtes plus un électron libre qu’autre chose. Mais pour coller un peu au personnage, vous pouvez choisir un nouveau nom comme c’est la coutume à la légion.
-Et bien comme je vous l’aie dit, appelez-moi Kanbeï tout simplement. Chez nous les hackers, nous n’utilisons pas de noms de famille.
-Vous n’êtes plus chez les hackers monsieur. Alors êtes-vous d’accord pour Kanbeï Takeukhi ?
-D’accord va pour Kanbeï Takeukhi mon général.
Souffla le japonais résigné.
-Très bien. Bon passons aux choses sérieuses. Je n’y vais pas par quatre chemins, je suis dans la merde. Pardon, nous sommes dans la merde. Car maintenant vous êtes tous les deux mouillés jusqu’au coup. Le gouvernement a décidé de garder la porte des étoiles pour lancer son propre programme militaire spatial. Le but est clair. Prévenir toute nouvelle attaque contre notre territoire ou nos intérêts par ces monstres. Cela veut dire que nous avons pour objectif de disposer à terme d’une présence militaire dans la galaxie de Pégase. Mais pour ça nous devons garder la porte.
-Garder la porte ? Elle n’est pas à nous ?
Demanda Estienne.
-C’est là le problème.
répliqua le général. La haute autorité internationale en charge de la porte des étoiles et de l’espace …
-Le CIS.
Dit Kanbeï.
- … en effet. Et ce comité secret qui regroupe les nations les plus puissantes de la planète va mettre son nez dans nos affaires. Un sommet est prévu ici même à partir de ce soir. Officiellement il a pour but de tirer un bilan de cette semaine de réflexion post attaque. Mais si vous voulez mon avis, il est là pour décider de l’avenir de la porte et des générateurs extraterrestres trouvés à la ligne Maginot.
-Vous avez raison mon général.
Entreprit Kanbeï. Les américains, chinois et russes ne vous laisseront pas disposer d’une porte. Pour eux vous n’êtes absolument rien sur l’échiquier politique.
-Et bien ils vont devoir s’y faire, notre position ne bougera pas d’un iota.
-Ne les sous-estimez pas général. Leur puissance est colossale. Et ils s’aident entre amis.
-Hmm je sais lieutenant, je sais. Mais notre marge de manœuvre est très réduite. Le programme étant secret, il est très difficile de faire pression. Seule la puissance militaire influe sur le résultat. Et ce n’est pas notre demi-victoire qui a failli nous couter la vie à tous qui va nous donner du poids. Seulement je n’ai pas encore abattu ma dernière carte. Le lieutenant Estienne à fait de très judicieuses remarques lors de son débriefing.
-Ah bon ?
répondit l’intéressé.
-Eh oui. C’est même pour ça que je ne vous aie pas jeté en pâture à la justice militaire.
-Ah. Bah merci …
chuchota Antoine.
-Lieutenant votre cursus historique est votre atout. Vous avez noté le fait qu’il était possible de s’approprier quelque chose découvert par soi-même. On pourrait dire que le premier arrivé est le premier servi. Comme il semblerait que toute cette histoire de porte soit liée au passé, j’espère que vous pourrez montrer que les premiers c’étaient nous et ce bien avant cette semaine. Nous devons trouver une quelconque raison juridique nous permettant de justifier le lancement d’un programme stargate. Messieurs vous partez tout de suite à l’issue de ce briefing pour le bunker du Hackenberg ou se trouve la porte. La DGSE s’occupe du site en lien avec l’armée. Ils ont déjà des spécialistes qui étudient l’artéfact. Mais je n’ai pas confiance en eux. Il y a des taupes américaines et chinoises partout. Toutefois je suis obligé de faire avec. Vous serez donc tenu de faire équipe avec un agent de la DGSE. Michel Lamoirin. Mais si vous pouvez lui fausser compagnie, n’hésitez pas. Bien des questions ?
-Qu’est-ce qu’on cherche là-bas ?
demanda Estienne.
-Tout ce qui peut nous aider à garder la porte.
-Le moins qu’on puisse dire c’est que c’est vaste.
Ajouta l’ex-pilote de chasse.
-Vous ferez avec. Maintenant partez, le sommet commence dans quelques heures.
Les deux lieutenants se levèrent. Ils n’étaient pas vraiment éclairé sur ce qu’ils allaient devoir entreprendre. Ils n’étaient pas non plus entrainés pour ça. Kanbeï, malgré sa connaissance des services de renseignement, n’avait jamais quitté son bureau climatisé de Tokyo. Quant à Estienne, ses aptitudes de pilote de chasse étaient bien loin de celles d’un agent secret. Mais les deux acceptaient la mission sans réserve. Estienne par patriotisme, Kanbeï par circonstance. La porte ne devait pas revenir aux USA ou à la Chine.
Il était temps, on entendait déjà les rotors de l’hélicoptère Fennec dehors. Après avoir adressé un salut militaire à leur supérieur, les deux lieutenants sortirent du bureau. Dumarchais vint interpeler une dernière fois le nippon.
-Eh ! Lieutenant Takheuki !
-Mon général ?
-Là ou vous allez, pas besoin de sabre. Laissez le ici c’est un ordre?
-Oui mon général.
-Rompez !
Kanbeï déposa le katana de son grand-père sur une chaise du bureau. C’est alors qu’il croisa un homme dans le couloir qui se dirigeait vers le bureau du général. L’homme d’une soixantaine d’années aux longs cheveux blancs portait un costume gris de politicien. Et pour cause, Patrick de Beaune avait tout d’un politicien. Il sentait le compromis, les alliances, les traitrises, les coups bas. Il ne s’intéressait qu’à sa propre personne. Or sa responsabilité était énorme. Il tomba nez à nez avec Dumarchais lorsque celui-ci allait refermer la porte de son bureau.
-Oh ! Tiens ?!? Bonjour général. Je m’excuse, je ne savais pas que vous étiez ici. On m’a dit que le sommet du CIS allait avoir lieu ici, alors je suis venu reconnaitre le terrain à la manière d’un joueur de foot. Si j’avais su, je serais venu vous dire bonjour plutôt.
Dumarchais était un peu embarrassé. Il était clair que la rencontre n’était pas fortuite. Voir de Beaune ici en toute liberté ne lui inspirait rien de bon. Mais bon il travaillait plus ou moins pour lui. C’était donc le bon moment d’en savoir plus.
-Bonjour monsieur de Beaune. C’est toujours un plaisir, mais ne vous inquiétez pas, je viens juste d’arriver. Vous n’avez rien manqué.
-Ah tant mieux. Eh dites-moi, ces militaires que je viens de croiser, ils travaillent pour vous ?
-Dans l’armée on ne travaille pas pour quelqu’un monsieur de Beaune. On travaille pour son pays.
-Mais bien entendu. Vous m’avez compris. Ah sinon tient pendant que je vous vois, parlons un peu de ce soir. Vous avez je suppose préparer votre dossier.
-Euh … j’y travaille. Mais j’avoue que j’aimerais en savoir plus sur mon rôle.
-Votre rôle ? Il est simple mon cher ami. Vous représenterez la France avec moi ce soir. Je dirige le volet politique, vous le volet technique.
-Cela ne va pas poser un problème de légitimité? Surtout devant un conseil international civil ?
-Le président n’avait pas vraiment le choix. Cela devrait être lui qui se charge de cette affaire. Mais après sa gestion calamiteuse de la crise, il a vu son pouvoir s’amoindrir dans les grandes largeurs. Considérez que le chef de l’Etat est le premier ministre. Mais c’est un néophyte. Il n’a jamais été mis au courant de l’existence de ce programme. Ainsi il m’a chargé de m’en occuper. J’aurais bien demandé à Hortense de faire votre job, mais j’avais des doutes. Elle est un peu jeune. Et puis le sommet s’annonce rude. Un bonhomme comme vous ne sera pas de trop pour notre défense. Ah ah ah.
Rigola Patrick.
-Notre défense ?
-Ah ah ah ah. Voyons général. Je ne vous apprends rien. Tout ce qui est secret est forcément pugnace. Puis-je savoir ce que sera votre argumentaire dans les grandes lignes ?
-Et bien l’artéfact se trouvant en France, le droit du sol nous permet de le garder.
-Non ! Non ! Non !!! Ah excusez-moi général, mais il ne faut pas dire ça. Venez je vais vous dire une chose.
Le politicien s’était alors rapproché très prêt de l’officier. Alexandre pouvait sentir l’Eau de Cologne sortir du col de chemise très serré de l’attaché gouvernemental. Ce dernier passa son bras autour de l’épaule du général. Le contact, le touché physique était très important en politique. Un homme politique ne soignait jamais aussi bien sa côte de popularité que lorsqu’il serrait des poignées de mains. C’est alors que de Beaune s’adressa à Dumarchais à voix basse.
-Général, nous attendons les autres nations au tournant ce soir. Il n’y aura pas de cadeau. Une porte des étoiles vaut très chère. C’est un objet immatériel. Le simple droit au sol ne sera pas suffisant pour garder la porte. Il nous faut bien plus. Et je compte sur vous. J’ai totalement confiance en vous. Vous n’êtes pas comme tous ces militaires fous de la gâchette qui à la moindre perte viennent se plaindre. Avec vous je sais que nous pourrons aller très loin. Je place tous mes espoirs en vous Alexandre. Et sachez que le premier ministre suivra cette affaire avec attention.
-Qu’est-ce que cela veut dire ?
-Ca veut dire que si vous voulez voir plus haut, vous avez plutôt intérêt à réussir. Sinon je suis sûr qu’on vous trouvera un commandement bidon quelque part. Pigé ?
-C’était très clair. Vous ne serez pas déçus.
-Bien.
S’exclama-t-il à voix haute. Ah ah ah ah ah. Très bien. Je me réjouis d’avance.
Port de Boosaaso, état du Pount, nord de la somalie – au même moment
Un petit cargo du nom de
Zortürk était amarré aux quais du port. Du moins si on pouvait appeler ça un quai. La somalie était considéré comme l’état le plus instable au monde. Partout la misère était visible. Non loin du cargo, un corps gisait sur le béton. Il n’en restait pas grand-chose, si ce n’était assez pour attirer toute sorte de charognards et de mouches. Personne n’avait pris la peine de l’inhumé. Pourtant il y avait une forte présence humaine sur les quais que l’odeur fétide de la mort ne semblait pas déranger. Une trentaine de dockers étaient en plein déchargement d’une cargaison hautement sensible sur le cargo portant pavillon thaïlandais. D’autres dizaines d’hommes attendaient non loin du lieu, gardé par une vingtaine de miliciens en armes, qu’on daigne leur offrir ne serait-ce qu’une heure de travail. Mais l’homme en charge du déchargement, un homme blanc en chemisette noire, n’avait pas besoin de main d’œuvre supplémentaire. La dernière caisse venait d’être sortit des entrailles du navire. Les hommes la chargeaient dans un vieux camion soviétique dont on peinait à croire qu’il pouvait encore rouler.
Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes lorsqu’une rafale de tir automatique se fit entendre. Par réflexe, tous les somaliens se mirent à couvert. Mais Perhan, l’homme à la chemisette noire, resta debout, inflexible. Il avait deviné qui était derrière cette entrée en scène spectaculaire. Un pick-up Toyota surmonté d’une mitrailleuse lourde s’immobilisa devant le Range Rover du marchand d’armes. Un des neuf passagers du tank de fortune descendit, kalache à la main et béret rouge sur le crane, pour aller à la rencontre de l’européen.
-Qu’est-ce que vous faites ici ? Ici c’est chez moi. C’est mon territoire. Je suis le dieu ici. Vous allez devoir payer très cher pour votre marchandise.
-Excusez-moi Abdellah …
-Seigneur Abdellah !
Répondit le chef des miliciens.
-… seigneur Abdellah. Mon client vous a déjà payé très cher. Suffisamment cher.
-Non. Il a payé l’autre cargaison. Pas celle-ci. Vous devez payer ! Tout de suite ou je vous ferais exécuter.
-Seigneur Abdellah, cette cargaison était comprise dans le versement de lundi.
-Non vous devez payer !!!
cria le milicien.
-Ecoutez, tenez, prenez ce téléphone satellite, mon client vous rassureras.
Perhan tendit un téléphone satellite au guerrier somalien qui le jeta à terre en criant une bardée d’insultes dans un dialecte local. Il était comme enragé. Mais Perhan n’avait pas peur. Il en avait vu d’autres. Et puis son client était si puissant qu’il pouvait écraser cette milice comme un insecte. C’était donc pourquoi le serbe attrapa la lanière du fusil d’assaut du milicien, le tirant vers lui. Tous les miliciens dégainèrent leurs armes et pointèrent le fautif. Mais en deux trois mouvements, le chef sanguinaire africain avait été retourné et était pris au piège dans les bras du marchand d’armes serbe. Ce dernier étranglait maintenant sa proie avec la lanière de la Kalachnikov. Le somalien se débattait sans rien pouvoir faire. Perhan s’entretenait alors à voix haute et en arabe auprès des soldats devant lui.
-Ecoutez-moi tous, mon client est très puissant. Il peut vous détruire ou vous couvrir d’or. C’est à vous de choisir. Cet homme a choisi et il a perdu. Quelqu’un d’autre veut essayer ?
Les miliciens ne savaient pas quoi faire. Leur chef emblématique était sur le point de succomber des mains du serbe. Ils n’avaient plus personne à qui obéir. Et ils avaient vu le campement ou étaient destinés les colis impayés. Il se tramait quelque chose d’important. Et ils ne feraient guère le poids. Alors que les mains de leur chef, agrippant la lanière autour de son coup, se relâchaient, les miliciens baissèrent leurs armes et démarrèrent leur pick-up pour sortir de la zone. Le calme relatif était revenu. Perhan lâcha le corps sans vie d’Abdellah et monta dans son 4×4, suivi par les camions transportant la secrète marchandise. Une bien méchante histoire se tramait.
Hackenberg, ligne Maginot – en début de soirée
Le petit hélicoptère venait dans le sens du soleil qui se couchait à l’ouest. Son rotor déplaçait un souffle d’air en direction du sol qui soulevait une légère couche de poussières. La voilure tournante se posa dans une petite clairière à 50 mètres de l’entrée du bunker. Ce dernier était gardé par plusieurs dizaines de soldats en armes du 6ème régiment du génie. L’état-major avait décidé de lui attribué la défense du site après l’avoir découvert. C’était très pratique, car le régiment étant en manœuvre depuis plusieurs semaines, il avait un alibi pour justifier sa présence. Antoine et Kanbeï sortirent de l’hélicoptère une fois les moteurs à l’arrêt. Ils avaient reçu un laisser passer avant d’embarquer à Paris, leur permettant de se déplacer en toute liberté.
Ils étaient tout de même un peu perdus. Toutefois Antoine ne tarda pas à reconnaitre les lieux qu’il avait pu étudier lors du rapport des commandos du COS. Cette semaine avait été très fructueuse pour l’aviateur. Car étant maintenant accrédité et qui plus est présent dans les pattes de Dumarchais, il avait eu accès aux rapports du SGC, du Homeworld Command et de l’expédition d’Atlantis. Du moins tous les rapports laissés à disposition des français. Ainsi Antoine n’avait eu accès qu’a un petit fragment de l’histoire de la porte. Et à cause du peu de temps devant lui, il avait dirigé ses recherches sur des thèmes bien précis, vaisseaux terriens, conflit avec les wraiths. Au final il s’était dispersé et en savait bien peu. Il allait tout de même devoir justifier la confiance placée en lui.
L’arrivée de l’hélicoptère n’était pas passé inaperçu, tous les soldats du génie regardaient les deux lieutenants s’avancer près du bunker. Antoine s’arrêta près d’un VAB pour demander à un mitrailleur de tourelle s’ils pouvaient rentrés dans l’édifice. Ce dernier ne sachant pas quoi répondre devant les deux officiers subalternes leur indiqua un chemin à suivre avec le bras. Là-bas ils auraient une meilleure réponse. Les deux hommes reprirent alors leur chemin vers l’entrée du bunker. Les regards ne s’étaient pas détournés pour autant, tous les sapeurs scrutèrent le binôme passer la porte. Il faut dire qu’ils avaient déjà tout vu sauf ça. Un lieutenant de l’armée de l’air accompagné d’un asiatique portant une tenue militaire revêtant un insigne de la légion. Mais ce qui était le plus troublant, ce n’était pas les deux jeunes hommes, mais assurément ce qui se trouvait dans le bunker.
Dès les premiers mètres à l’intérieur, un froid de caverne se fit sentir. Antoine, qui avait retroussé ses manches, avait la chair de poule. Il ne s’attarda pas pour les remettre en place. De son côté Kanbeï se sentait de plus en plus mal à l’aise. Il avait devant lui un vrai bivouac improvisé dans la galerie d’entrée principale ou une cinquantaine de soldats se préparaient à diner et à passer une 9ème nuit dans cette ancienne forteresse. Il entendait certains parler entre eux. Ils se demandaient ce que faisait un légionnaire, ici dans ce qui était devenu l’endroit le plus secret de France. Mais le calvaire touchait à sa fin. Quelqu’un appela les deux officiers par leur nom de familles. On eut l’impression qu’il criait à cause de la résonnance des parois. Les deux appelés tournèrent immédiatement la direction dans le sens de la voix qui scandait leur nom. A droite du camp de fortune du génie, un passage était laissé libre pour accéder au reste du bâtiment. Un homme en civil, dont il ne pouvait pas bien voir l’allure, se trouvait à une trentaine de mètres et était l’origine de l’appel. A ses côtés, un militaire, officier supérieur de par son képi, leur faisait de grands signes avec les bras. Calmement, Antoine et Kanbeï allèrent à la rencontre de leur hôte. Antoine commença par un salut militaire ce qu’oublia de faire Kanbeï.
-Alors légionnaire ! On ne vous apprend pas la politesse chez vous ?
s’exclama le colonel, chef du régiment du génie.
-Euh pardon mon colonel ! A vos ordres mon colonel.
rectifia anxieusement le japonais.
Devant la courte panique du japonais, le colonel se mit à rire très fort. Il aimait bien paraitre sévère en première impression pour pouvoir assoir son autorité avant de redevenir normal. A côté de lui se trouvait l’homme en civil. Il portait une chemise blanche et une légère veste noire. Il se présenta devant les deux nouveaux. C’était lui leur « babysitteur », Michel Lamoirin, agent de la DGSE spécialement affecté à l’enquête sur la porte. Il avait été choisi pour ses capacités de management. Il dirigeait à merveille les équipes de chercheurs postées sur le site depuis le début de la semaine. Il jouait sur les membres du personnel. Il délivrait certaines informations à des personnes et non à d’autres. Et au bout d’un long travail de mise en confiance, il avait réussi à tirer le meilleur de ses équipes, sans dévoiler aucun secret au plus grand nombre. Permettant de la sorte de contenir tant bien que mal les fuites.
Tout de suite il tenta de s’accorder la confiance des deux militaires. La poignée de main fut franche et amicale. Assortie d’un large sourire et de quelques paroles bien trouvées. Il semblait faire mouche sur Antoine qui marchait beaucoup au contact humain. C’était moins le cas pour Kanbeï qui savait de quoi étaient capables les hommes des services secrets. Sans compter qu’il gardait à l’esprit que le complexe était déjà surement infiltré par des agents étrangers. L’homme aux lunettes d’une cinquantaine d’années avec une légère calvitie invita les lieutenants à le suivre. Une fois arrivé à la lourde porte blindée protégeant le complexe en cas de très forte explosion, le groupe se vit délaissé du colonel. Il n’était d’aucune utilité pour la suite de la mission. Le trio arriva dans un pc improvisé. Dans la petite salle surchauffée, plusieurs opérateurs suivaient sur des ordinateurs l’avancement de l’enquête. Certains étaient chargés de la vidéosurveillance, d’autres effectuaient des recherches à partir de la base de donnée du CIS, d’autres contrôlaient les mesures effectuées sur la porte. Lamoirin accompagna ses deux invités dans son bureau. C’était une petite pièce arrangé en bureau.
-Alors c’est vous les enquêteurs de l’armée, lança l’agent en scrutant un dossier classé secret défense. Et donc vous êtes accrédité par la général Dumarchais
-Voilà.
répliqua le pilote français.
- Un pilote de chasse et un légionnaire inconnu au bataillon jusqu’à cette après-midi comme enquêteurs c’est assez particulier.
Rajouta Lamoirin.
-Et un artéfact extraterrestre permettant d’établir des voyages avec d’autres planètes de la galaxie, c’est assez particulier ?
Répondit sèchement le nippon.
-Bon je vais être franc avec vous. La méfiance est de mise. Je n’ai guère confiance en personne ici. Je ne me méfie pas plus de vous que des hommes sur place ici. Donc je vous laisserais un accès libre aux recherches et investigations. Mais je me tiens en dehors de vos affaires. Ainsi chacun s’occupera de ses affaires sans arrière-pensée. C’est compris ?
-Très clair.
répondit Antoine.
-Et maintenant si on parlait du fond plutôt que de parler de la forme.
Renchérit Kanbeï
-Hmm. Et bien nous avançons. D’abord techniquement, nous avons eu peur d’avoir un incident nucléaire …
-A cause des radiations.
suggéra Kanbeï
-… oui on a cru à un Fukushima bis. Mais au final l’artéfact n’émettait plus de radiations quand nous l’avons trouvé. Les doses diffusées étant assez faible, on ne craint pas une contamination trop forte pour des expositions de courtes durées. On a quand même pris la précaution de sortir tout le matériel alien et la porte de la salle. Ensuite on a chargé un groupe d’expert de la DGA de se prononcer sur l’état de l’engin. Et d’après une scientifique la porte serait en état de marche.
-On vous a dit le nom de cette scientifique ?
demanda Antoine qui avait une idée derrière la tête.
- Mademoiselle Leblanc, si vous voulez savoir son nom. Selon elle, la machine est opérationnelle. Sinon nous avons aussi avancé sur la provenance de la porte. Et autant vous dire que c’est du lourd, ça ne va pas plaire à votre chef. D’après les registres, la porte était connue sous le nom de Ziel3625. Oui vous avez bien entendu, c’est de l’allemand. Cette porte est une prise de guerre. Elle a été récupérée à la libération par les forces du maréchal Leclerc.
Les deux jeunes militaires étaient silencieux. Pour une surprise c’était une surprise. La porte était donc allemande. Et même pire, elle était peut-être nazie. Si la surprise était réussie, ce n’était pas du tout une bonne nouvelle. Il faudrait probablement se replonger dans un passé très proche et douloureux pour en savoir plus. Pour ça, un avion avait été affrété pour le lendemain. Il devait emmener Lamoirin et une petite équipe en Allemagne. A Coblence plus précisément, au centre des archives fédérales allemandes. C’était le meilleur endroit pour dénicher des secrets du passé terrifiant de l’Allemagne. Là-bas, Lamoirin occuperait les autorités allemandes et il l’espérait, les espions étrangers. Donnant un court temps d’action aux deux jeunes envoyés pour réaliser leur enquête de leur côté.
Mais Kanbeï fit enfin remarquer qu’ils pouvaient certes communiquer en Anglais avec n’importe quel allemand, mais qu’ils éprouveraient un mal fou lors de l’étude des archives rédigées en langue germanique. Lamoirin était embêté. Il n’avait pas pensé à la barrière de la langue. Et adjoindre un interprète aux deux militaires étaient impossible. Les accréditations avaient déjà toutes été données. Ils devraient se contenter des personnels ayant déjà signé des actes de non divulgation de niveaux très élevés. Lamoirin sortit alors un listing d’un coffre-fort placé derrière son bureau. Dessus était répertorié tout le personnel présent sur le site. L’agent de la DGSE trouva trois profils intéressants. Il décida de laisser choisir les deux jeunes soldats car après tout c’était eux qui allaient avoir à faire avec l’interprète de fortune. Les trois profils avaient tous le même critère principal, ils parlaient et savaient lire l’allemand. L’un était scientifique de la DGA. Un autre était informaticien à la DGSE. Et le dernier était un soldat du génie. Le trio dans le bureau n’arrivait pas à se mettre d’accord. Ce qui exaspérait Lamoirin qui avait d’autres choses plus importantes à faire. Il stoppa alors la discussion pour demander à Antoine de trancher. Ce dernier était alors la cible du regard des deux autres. Si cela ne tenait qu’à lui, il aurait choisi les trois car il les trouvait complémentaire. Mais on fond de lui, une petite voix le poussait à prendre le dernier. C’était un sentiment étrange. Il sentait quelque chose se dégager de ce choix. Comme si cette décision allait impacter son avenir. Il était tellement interloqué par ce choix somme toute banal que son esprit fut parti l’espace de quelques secondes. Il ne se rendit même pas vraiment compte qu’il avait désigné le troisième choix sans réfléchir. Michel lui demanda s’il était sûr de son choix et sans hésiter Antoine répondit oui. Avec le sentiment d’avoir pris plus qu’une bonne discussion. Alors que Michel Lamoirin s’apprêtait à conclure l’affaire, le téléphone se mit à sonner. C’était important, il devait décrocher. Il invita les militaires à sortir et leur donna rendez-vous le lendemain matin à 8h30. Un trajet d’une heure en camion suivie d’une autre heure en avion cette fois-ci les amèneraient à Coblence. Sans déranger, les deux jeunes hommes partirent sans faire de bruit. Ils devraient être prêts pour le départ du lendemain. Sans savoir qui les accompagnerait.
Base aérienne 117 – 20h30 – 15 avril 2013
Cette soirée serait tranquille. Il fallait qu’elle le soit se répéta Dumarchais. En tant que chef de l’enquête française il devait faire bonne figure. La France jouait son avenir dans ce nouveau concert des nations. Et dieu sait que la France était isolée. Ses alliés européens n’en étaient pas vraiment. Et puis ils avaient autant de poids qu’elle dans l’affaire, c’est-à-dire très peu. La Russie était neutre de nature. La Chine allait surement faire valoir sa puissance économique et son désir d’affirmation de son statut de grande puissance. A vrai dire les français ne se faisaient pas d’allusions sur ce point. La seule vraie inconnue serait les Etats-Unis. Le pays avait la main mise sur le CIS et le Homeworld Command. Et bien malin était celui qui pouvait lire dans le jeu des atlantistes. L’après-midi ils vous tapaient dans le dos en vous rappelant que vous êtes leur plus grand allié. Et le soir ils signaient un traité qui vous condamne. Une relation bien particulière. Beaucoup plus complexe que celle de l’Oncle Sam vis-à-vis de la Grande-Bretagne ou du Canada. D’ailleurs Dumarchais croyait savoir que même De Beaune, l’homme qui trahissait plus vite que son ombre, ne savait pas à quoi s’en tenir lors de ce sommet. Si ce n’était que la partie serait compliquée.
Ce premier soir ne lançait pas les hostilités. Un banquet était dressé pour célébrer la victoire terrienne. Ce qui en somme n’était pas plus mal. Les participants avaient le temps de faire vite fait connaissance avec leur adversaire de demain. Comme un repas de gladiateurs la veille d’un combat. Tout le monde était là. Tout le petit monde du programme porte des étoiles. Excepté le chef du Homeworld Command qui n’appréciait pas vraiment ce genre de festivités. Il avait envoyé son compère de toujours, le docteur Daniel Jackson, ainsi que le général Landry pour représenter les forces armées. De son côté le CIS avait dépêché son petit monde. L’inévitable et très précieux Richard Woolsey, chef de l’expédition d’Atlantis qui depuis son retour sur Terre n’en était plus vraiment une. Tous les représentants étatiques du CIS étaient là. Patrick De Beaune pour la France, Carl Strom pour les USA, Léonid Stepovich pour la fédération de Russie, Chen Zan pour la république populaire de Chine. Là étaient les principaux acteurs de ce sommet.
Dumarchais après avoir salué bon nombre de diplomates et de militaires se retrouva au bout d’une table en compagnie d’Hortense Riveron. Cette dernière était là en tant qu’attaché ministérielle. Enfin officiellement. Elle servait surtout d’assistante auprès de De Beaune. La discussion entre elle et Dumarchais était cordiale. Ils avaient eu plusieurs occasions de travailler ensemble cette semaine. Dire qu’ils s’appréciaient c’était peut-être vite dit, mais il y avait un certain respect mutuel. La jeune bureaucrate fit une confidence au général anxieux. Suite à l’attaque sur la Terre, le CIS avait été remodelé en profondeur. Certains « parasites » avaient été priés de dégager. D’autres avaient été promu. On avait même changé de directeur exécutif. Un changement effectué en coulisse que personne n’osait vraiment évoquer. Car, révéla Hortense, ce changement faisait grincer des dents. Mais c’était loin d’être une mauvaise chose pour la France. En effet, le nouveau directeur était un sud-coréen, Choe Young-nam. Les américains étaient pour beaucoup dans la nomination de cet homme. On ne savait pas encore exactement quel pouvoir il détenait réellement. Ni le but réel de sa nomination. La conséquence directe, était un durcissement du CIS vis-à-vis de la Chine et une politique américanisé. Il ne faudrait pas l’oublier au moment opportun.
Base aérienne de Büchel – Allemagne – 11h30 – 16 avril 2013
La journée était radieuse en ces premières semaines de printemps. Les français avaient embarqués avec un peu de retard. Cela avait permis à Antoine et Kanbeï de faire connaissance avec leur interprète. Telle ne fut pas la surprise quand ils découvrirent que le soldat du génie choisi au hasard par Estienne était le sergent Damien Delcourt. Ce même homme qu’ils avaient dirigé lors de la bataille de l’Est. Comme quoi le hasard faisait bien les choses. Delcourt avait reçu l’ordre d’accompagner les lieutenants Estienne et Takeukhi. Il n’en savait pas plus. Et cela ne le réjouissait pas vraiment. On lui avait notifié qu’il serait interprète, une tache qu’il avait plutôt bien accomplie lors de son déploiement en Afghanistan un an plus tôt. Il restait marqué par ce qu’il avait vu cette nuit du jeudi 6 avril 2011. Mais le contact passait plutôt bien avec ses supérieurs. Il faut dire que les deux jeunes officiers subalternes n’avaient rien d’effrayant ou de repoussant. Le sergent pouvait avoir confiance en ses deux chefs. Et l’inverse était aussi vrai. Damien avait pour lui cette fidélité et ce respect que les militaires entretiennent jalousement.
Le tarmac de la base devenait enfin vivable sans les nuisances sonores avec l’arrêt des turbopropulseurs du Transall. Tout son petit monde avait été débarqué dans une certaine pagaille que ne semblait pas connaitre le personnel de la Luftwaffe. Les civils de la DGSE et les militaires de l’armée de l’air s’étaient dispersés à droite et à gauche. Il n’y avait pas de vraie cohésion de groupe. Ni d’ailleurs d’esprit d’équipe. Kanbeï avait suivi Lamoirin. Il ne voulait manquer aucune miette. Il prenait son rôle très au sérieux. Pourtant quelque chose n’allait pas. A force, les gens finiraient par cataloguer le japonais comme un éternel être renfermé, un solitaire peu bavard. Cette fois ci c’était pire. Il avait la nausée et une certaine colère au fond de lui. Il connaissait très bien les installations de cette base et ce qu’elles renfermaient. Il était pressé de finir sa mission et de partir loin d’ici. Car à Büchel était entreposé un stock d’armes nucléaires américaines. Ce qui lui rappelait rageusement sa ville natale d’Hiroshima.
Pour d’autres raison, Michel Lamoirin aussi voulait en finir vite. L’enquête n’avançait pas pendant qu’ils étaient sur cette base. Mais les choses se passaient comme il l’avait prévu. Son homologue des services secrets allemands lui annonçait une nouvelle qu’il connaissait déjà. Un repas était prévu entre l’équipe française et les autorités allemandes. Une liste des invités avait été dressée. Mais le nom du nippon tout comme ceux de ses deux compères ne figurait plus sur la liste à la suite d’une rapide manœuvre informatique. Alors que la délégation se mit en marche, Kanbeï vint taper délicatement sur l’épaule de l’officier supérieur allemand.
-Excusez-moi officier, lieutenant Takeukhi légion étrangère !
-Lieutenant ?
Lui répondit Adam Meltzer du Service Fédéral de Renseignement (BND).
-Il y a un problème. Je ne suis pas sur la liste monsieur. Ni moi ni le lieutenant Estienne et le sergent Delcourt.
-Ah bon ?
-Oui regardez j’ai reçu la liste sur mon smartphone et je n’en fait pas partie.
-Ah tiens. Oui vous dites vrai. C’est étrange. Et bien je vais tenter d’arranger ça.
-Hein oh non ne vous dérangez pas pour nous ! Nous ne sommes que des officiers de liaison. Peut-être pourrions-nous directement nous rendre au centre des archives fédérales ? Nous avaleront quelque chose en chemin.
-Non ! Je ne peux pas vous laisser y aller seuls !
-Ah ! Euh nous pouvons très bien y aller avec un de vos agents.
-Hmm … bon je vais voir. Restez ici, si je trouve un agent de libre et une escorte je vous les envoie. Mais si je ne trouve personne vous devrez attendre la fin du déjeuner.
-Très bien monsieur. Aucun problème.
Meltzer partit aussitôt la discussion terminée. Mais il prit tout de même la peine de contacter son service pour trouver un agent. On lui répondit que quelqu’un pourrait se libérer et qu’une équipe était sur place. Le japonais et ses amis n’attendraient pas longtemps. Si tant est qu’ils soient eux même présent. Kanbeï avait mis la main sur Damien. Le sergent était sur le point de rejoindre le repas organisé en l’honneur de la présence française. Kanbeï lui expliqua rapidement qu’ils avaient autre chose à faire. Le pauvre sapeur du génie était de plus en plus perdu. Mais sans discuter il se mit au pas. La discipline il connaissait. Il avait d’ailleurs eu du mal à s’y faire. Depuis son retour d’Afghanistan et sa mutation à Angers, il tentait de démarrer une nouvelle carrière. Loin de tous ses soucis initiaux. Mais au fond de lui il avait toujours le sentiment qu’il était prêt à déraper. Il ne pensait jamais à mal, mais il ne suffit pas de vouloir le bien pour faire le bien. Et pour éviter ça, il avait besoin de temps et de quelqu’un qui le comprenne.
Sans que Damien le sache, Antoine était la personne idéale. Il n’était pas comme tous les militaires. Il gardait au fond de lui une certaine réticence au caractère autoritaire de l’armée. Pour lui, un soldat qui pense et qui se pense en tant que tel est un meilleur soldat qu’un autre qui se contente d’obéir par manque de courage ou par faiblesse intellectuelle. Il est toujours plus simple d’abandonner toute réflexion et toute responsabilité pour se fondre dans un uniforme. Antoine était différent, il idéalisait la fonction de pilote de chasse. Il était de ceux qui pensent que les pilotes, au même titre que les sous-mariniers sont des corps à part. Ils sont transnationaux. Comme le disait Bruce Cole, un pilote de chasse allié dans le Grand Cirque de Clostermann, la bible d’Antoine et plus généralement de tous les pilotes de chasse français, « l’homme qui a eu l’idée de mettre une cocarde sur un avion est un salaud. » C’est cette vision des choses et ce sentiment d’appartenance à une caste bien particulière qui lui avait permis de s’engager 4 ans plutôt dans les VVS, l’armée de l’air russe. Enfin engagé c’est un bien grand mot. A l’origine il effectuait un mémoire en préparation d’une thèse sur l’encadrement des commissaires politiques soviétiques du groupe de chasse français Normandie-Niemen à l’Université d’Etat des Sciences Humaines de Russie à Moscou. Ce travail long et ardu était tout sauf facile. D’abord si Antoine maitrisait relativement bien le latin, le grec et l’alphabet cyrillique lui étaient tout à fait étrangers. Il du donc se mettre sérieusement au russe. A partir de là il put commencer à s’intégrer un peu à la société russe. Travailler sur l’aviation militaire était quelque chose de très gratifiant pour Antoine. Être pilote de chasse étant devenu un rêve bien utopique après son échec d’admission à l’école de l’air à la sortie de son baccalauréat scientifique.
Mais cette nuit du 6 novembre 2009 avait tout changé. Il ne se rappelait pas de tout. Il faut dire qu’après une sévère cuite la vodka il était difficilement possible de se souvenir de sa soirée. Quelques images lui restaient toutefois en tête. Il se rappelait ce magnifique écrin blanc recouvrant la capitale russe. Mais aussi ce froid glacial qui vous transperce de part en part. Il se voyait marcher, tituber, la nuit, accompagné de quelques amis récemment rencontrés sur les bords de la fac moscovite. Puis rentrer dans une boite de nuit ou la musique atroce masquait les discussions d’hommes de la pègre assis dans un coin de ce temple de la débauche et du mauvais gout. A l’image de cette nouvelle Russie de Poutine, post soviétique mais pas vraiment libérée. Les hématomes qu’il avait sur le bras gauche, qui le faisait encore souffrir deux jours après avoir fini d’évacuer tout l’alcool présent dans son sang, étaient un indice qui lui faisait penser qu’il s’était battu ce soir-là. Mais il ne pouvait en être sûr, il n’avait jamais su comment il était sorti de la boite de nuit. Ni comment il s’était retrouvé chez la charmante Anzhelina, une jeune fille pas farouche, avant que cette dernière ne lui notifia par un langage des signes assez simpliste qu’il devait partir. Il valait mieux pour lui, la jolie russe ayant 17 ans, il aurait pu se retrouver dans une très mauvaise situation au retour des parents de la dite jeune femme. Le tout s’en avoir conscience. De là le reste de la soirée, ou plutôt de la nuit, était bien sombre. Il ne lui restait que deux ou trois images. Celle d’abord de ses pas sur la glace toute fragile à cette époque de la Moskova. Puis de la rupture du sol sous ses pieds et de sa descente en enfer. Un enfer froid, très froid, trop froid. Dans l’eau sombre comme la mort, il ne pouvait se souvenir que de sonorités très lointaines. Celle du cri d’une femme qui criait à l’aide. Celle de deux hommes s’approchant. D’une sirène rugissant au loin. Et puis il y avait cette voix intérieure. Cette voix de la survie. Si précieuse dans ce moment décisif. Celle qui le fut tenir le temps que les deux gardes du Kremlin voisin viennent le repêcher. Qu’ils lui prodiguent les premiers gestes de secours. Et qu’ils le remettent aux ambulanciers arrivés très tôt sur place.
Étonnement la suite, il s’en souvenait très bien. L’eau glacée lui ayant servi d’électrochoc. Son admission dans un hôpital et sa rencontre avec un autre miraculé de la nuit fut la première pierre d’un rêve dont qu’il ne pensait plus qu’il était possible. A côté de son lit d’hôpital, un russe frisant la quarantaine avec une jambe dans le plâtre à cause d’une satanée glissade dans les rues de Moscou. Les deux hommes firent connaissance. Antoine se présenta. Vladimir Pavel Ouchinsky qui était habitué aux personnes fortement alcoolisées fit de même. Puis Antoine révéla qu’il était historien (pas encore en fait) et qu’il travaillait sur le Normandie-Niemen. Ce qui sembla vraiment intéresser le russe. Ce dernier, après avoir loué le travail du jeune français y alla de sa confidence. Son grand-père, Ivanovitch Andreev Ouchinsky, était un jeune soldat réquisitionné qui servit dans la logistique du groupe de chasse français à partir de 1943. Antoine, soul comme un âne, rigola et leva sa main droite en prononçant une réplique populaire américaine qui était vraiment ridicule dans cette situation. Le russe, très amusé par l’hurluberlu français, gardait un visage impassible mais tapa néanmoins dans la main du français en répliquant « Tovaritch ! ». Cette histoire aurait pu paraitre anecdotique si Ouchinsky n’avait pas été colonel dans l’armée de l’air russe.
L’histoire de cette nuit faisait encore sourire le pilote francophone. Il avait tenté le concours de l’air à la sortie du lycée sans succès. Il avait forcé la chance sans arriver à la contraindre. Et finalement c’était elle qui s’était imposé par un coup du sort trois ans plus tard. Il avait beaucoup appris au contact de l’officier russe. Il avait perfectionné son niveau de russe. Il avait rencontré des hommes de grandes valeurs. Mais il s’était surtout vu recevoir une chance ultime. Celle de voler en tandem avec le colonel. Au cours de ce vol, Vladimir lui laissa les commandes pour pouvoir tester le français. Antoine n’en demandait pas plus et fit bonne impression. Tellement que l’officier le prit sous son aile comme l’avait fait pour lui son mentor, le commandant Igor Alexenko. Mais le contact entre les deux finit par se distendre. Ouchinsky devenant de plus en plus colérique et problématique à vivre. En particulier à cause de son problème d’alcool et de sa hiérarchie qu’il supportait de moins en moins. Antoine finit par quitter la Russie mais avec les enseignements d’un vrai grand pilote de chasse. Tellement qu’il n’eut pas de mal à réussir le concours d’entrée de l’école de l’air à Salon de Provence le mois suivant de son retour en France. De là et avec l’aide de Kanbeï qui le favorisa grandement dans cette compétition acharnée qu’était celle d’un apprenti pilote de chasse, il put enfin réaliser son rêve. Toujours sans se considérer comme un vrai militaire pur souche. Il avait depuis deux mentors, Pierre Clostermann ET Vladimir Pavel Ouchinsky.
Antoine, Damien et Kanbeï avait pour eux ce parcours atypique qui forge une personnalité bien particulière. Alors que les deux derniers avaient été rejoints par l’agent allemand envoyé à leur rencontre, Antoine lui, était debout les yeux grands ouverts en admiration devant un Eurofighter Typhoon de la Luftwaffe. Il reluquait les lignes parfaites du chasseur européen. Il se laissa aller à s’approcher tellement près de l’avion de chasse qu’il put toucher les entrées d’air ventrales. Il était en pleine réflexion. Pensant aux avantages et aux inconvénients de l’avion. Il s’imaginait aux commandes. Mais il fut vite ramener à la réalité. Quelqu’un qu’il n’avait pas vu venir le somma de mettre les mains sur la tête avec un accent allemand facilement reconnaissable.
Merde pensa le français, sûr d’avoir commis une bêtise. Il se retourna, les mains derrière le crâne avec le visage d’un enfant ayant commis une bêtise. L’homme en face de lui rigola aussitôt avec un rire aigu. La petite tête blonde en combinaison de vol ne dépassait pas 1 mètre 75. Parsemée d’un grand sourire et d’yeux aussi bleus que le ciel. Antoine comprit très vite qu’il n’avait pas à faire à un mauvais bougre.
-Dites donc c’est mon avion là. N’allez pas me l’abimer !
-Pardonnez-moi ! Lieutenant Antoine Estienne, armée de l’air française.
-Capitaine Walter Brandt, Luftwaffe. Enchanté !
-Alors vous pilotez sur Typhoon ? demanda Antoine beaucoup plus à l’aise.
-Ja ! Je pilote au sein du Jagdbombergeschwader 33.
-Escadrille de chasseurs bombardiers ? Avec des Typhoon ?
-Ja. C’est sûr que pour ça votre rafale est surement meilleur. Mais bon il faut bien rentabiliser l’avion. Vous connaissez bien la Luftwaffe lieutenant ?
-Un peu grâce au Grand Cirque …
-Clostermann !
-Ah vous connaissez ?
-Ja. Votre plus grand as. Combien ? 30 victoires ?
-33 …
-Ah je n’étais pas loin. Je savais que c’était beaucoup moins que les as allemands.
-Oui mais du bon côté lui.
-Certes … Et donc vous faites partie de tout ce remue-ménage sur ma base ? Vous êtes quoi, le pilote du Transall ?
-Heu non c’est compliqué. Je bosse dans les renseignements. Mais avant j’étais pilote sur mirage 2000.
-Et bien vos carrières sont très courtes chez vous, plaisanta l’allemand. Toutefois j’espère que vous piloterez à nouveau un jour. En attendant je dois vous laisser, j’ai une patrouille à mener.
-Oui bien sûr. Bon vol capitaine !
-Merci lieutenant et peut-être à une prochaine fois.
Antoine s’écarta pour laisser le pilote allemand, avec ses mécaniciens arrivés entre temps, préparé sa mission. Le contact était plutôt bien passé. Il lui sembla fort sympathique. Mais la remarque du capitaine fit mouche. Il se demanda un court instant s’il ne fallait pas abandonner ce nouveau rôle de pseudo agent secret pour retourner aux commandes d’un avion de chasse …
Il n’eut pas le temps de se morfondre que Kanbeï arriva à ses côtés. Les deux échangèrent quelques mots. ¨Pendant ce temps-là, un homme blanc et chauve habillé d’une veste noire passe partout s’était rapproché.
-Gunter Von Stauffer, BND. Lieutenant Takeukhi ?
-Oui enchanté.
répondit l’intéressé. Et voici le lieutenant Estienne et le sergent Delcourt. C’est vous notre escorte pour Coblence ?
-En partie oui. Nous aurons un détachement du GSG9 avec nous.
-Des commandos ?
répliqua Antoine surpris.
-Oui on n’a émis une alerte anti-terroriste ce matin. Mais ne vous inquiétez pas ça arrive tout le temps. C’est la procédure.
Les français et le japonais échangèrent une série de regards circonspects. Tout de suite après, un convoi de véhicules s’immobilisa devant eux. Une grande berline break BMW série 5 banalisée précédée par deux motards de la bundespolizei. Suivie par une autre BMW série 5, berline simple cette fois ci, arborant les nouvelles couleurs bleues de la police fédérale allemande (BPOL) ainsi qu’une large rampe de gyrophares sur le toit. Et enfin un Volkswagen Multivan banalisé, rempli de policiers d’élite du GSG9.
Face à ce dispositif pour le moins musclé, les français n’étaient pas vraiment rassurés. Gunter, leur agent de liaison, les invita à prendre place à l’arrière du break banalisé. Lui, prenant la place de passager avant droit. Les convives s’exécutèrent et le convoi se mit en route. Le silence était total dans la voiture jusqu’à la sortie de la base. Von Stauffer en profita pour briser la glace. Il se présenta un peu plus en détail. Et il laissa les étrangers posés leurs éventuelles questions. Antoine en profita pour demander le temps de trajet jusqu’à Coblence. L’agent fédéral leur répondit qu’il fallait compter 45 minutes en temps normal mais que là en 30 minutes ils seraient à bon port avec l’apport des forces de police. Le temps était plus que jamais compté …
Somalie – Au même moment
Des coups de feu se faisaient entendre au loin. On les entendait à peine à cause du vacarme des réacteurs à l’allumage. Surement des miliciens se battant entre factions. Mais l’enjeu voulait qu’on soit prudent. Perhan demanda confirmation à la radio. Il fut rassuré d’entendre que des miliciens faisaient un pillage brutal dans un village à plusieurs kilomètres. Ils leurs faudrait un peu de temps avant d’avoir assouvi leur pulsion barbare. C’était justement le temps dont le serbe avait besoin.
Les avions étaient prêts. On avait passé la nuit à les vérifier et à leur adjoindre la précieuse cargaison. Avec de la chance ils n’auraient pas l’utiliser et reviendraient ni vu ni connu au campement. Mais les renseignements étaient peu optimiste. Et le jeu en valait la chandelle. Les mécaniciens, tous des mercenaires, dont la majorité de l’ancien bloc de l’est, voyaient leurs efforts récompensés. Les machines tournaient impeccablement. Et les pilotes pouvaient maintenant prendre place pour leur délicate mission. Le vol serait long et périlleux. Tellement périlleux, qu’on avait plus ou moins menti aux principaux intéressés. Leur promettant des secours en cas de besoin. N’importe qui se serait méfié. Mais on se méfie volontiers moins contre 2 millions de dollars américains sur un compte offshore. Les pilotes, Youssef et Rodrigo, avaient bien insisté sur ce point. Mais l’argent n’était pas un problème pour Perhan. Le problème était de voir ses avions décollés. Plus ils étaient loin, moins il était responsable pensait le marchand d’armes qui avait en partie raison.
Les aiguilles de la montre de l’européen trottaient inexorablement et les avions n’étaient toujours pas en vol. Or le cargo devait déjà être parti à cette heure-ci. Il fallait que les avions soient au rendez-vous ! Le trafiquant suait à grandes gouttes. La chaleur était intenable. L’air sec teinté de vapeurs d’hydrocarbures asphyxiait le petit monde au sol. Un air nocif à coup sûr. Mais Perhan s’en fichait, ses avions décollaient enfin. Leurs larges silhouettes noires disparûtes très vite de la vue du serbe. Tout heureux de voir son gagne-pain s’envoler.
A suivre dans le
Chapitre 7 :Terreur sur le Deutsche Eck