CITATION
Le général Denis Mercier, chef d’état-major de l’armée de l’air, a détaillé jeudi 29 janvier à Paris le contexte et les circonstances de l’accident dramatique d’Albacete, qui a tué neuf aviateurs français et en a blessé grièvement cinq autres lundi au cours d’un entraînement entre alliés de l’Organisation du traité de l'Atlantique Nord.
Quand l’accident a eu lieu cet après-midi-là, deux Mirage 2000-5 français venaient tout juste de décoller. « Les autres avions étaient sur le parking en train de mettre en route, alors que certains avions de la coalition du jour étaient en train de décoller eux-mêmes, avec une patrouille de quatre F16 grecs. Le dernier des appareils grecs, au décollage, a eu un problème qui a fait que son équipage a tenté de s’éjecter », a expliqué le général Mercier.
« D'UN COUP, C'EST L'HORREUR »
L’avion, qui a fortement dévié de sa trajectoire, « est venu percuter la ligne française et un peu la ligne italienne qui était à côté », provoquant la mort de neuf Français et blessant une dizaine de personne côté italien. Ce bilan est « très très lourd », a souligné le général, les traits marqués, en rendant hommage à ses personnels :
« L’image qui me vient en tête, quand on commence à écouter les premiers témoignages, c’est ce film “Pearl Harbour” : les gens sont dans leurs occupations opérationnelles, en temps de paix, tout est calme, chacun à sa place au bon endroit, et d’un seul coup c’est l’horreur. »
Le chef d’état-major a décrit des scènes terribles : « Des mécaniciens qui pensaient, alors que tout était en feu, à sauver les avions, à pousser les Rafale plus qu’à sauver leur propre vie. (...) Un pilote qui s’est précipité alors qu’un mécanicien était sous un avion, il fait partie de nos grands brûlés, mais il lui a sauvé la vie, il faudra aussi savoir récompenser ces actions-là. »
LA SÉCURITÉ EST « ADAPTÉE »
Le rapatriement des neuf corps a attendu l'accord des autorités espagnoles. Il était prévu pour jeudi soir, à Nancy. En ce qui concerne les blessés, trois étaient soignés au service des grands brûlés de Madrid. Deux ont été traités à Albacete, « victimes de beaucoup de fractures, des personnels qui ont été polycriblés par les débris sur F16 et des appareils sur lesquels il est tombé ».
Un des grands brûlés, le plus atteint, se trouve toujours à Madrid et devrait être rapatrié au début de la semaine prochaine. Par ailleurs, depuis la catastrophe, des psychologues et des psychiatres du service de santé ont été dépêchés à Nancy et à Albacete : les militaires présents ont été extrêmement choqués.
Toutefois, la sécurité de la base d'Albacete n’est selon le général Denis Mercier pas en cause : « Elle est parfaitement adaptée. Cet accident ne vient pas d’un problème de sécurité ou de l’organisation, il vient d’un problème de malchance totale, d’un avion qui dévie 40 à 45 degrés de sa trajectoire au décollage alors qu’il a une panne, ce qui est extrêmement rare, et vient taper sur une ligne d’avions alors qu’à quelques mètres près cela aurait pu être très différent. »
« GARANTIE DE TRANSPARENCE »
Le général Mercier a également précisé l’exercice qui avait lieu, le Tactical Leadership Program, qui concerne des équipages très expérimentés, dans le but de leur apprendre à travailler en coalition. Y ont participé cette fois deux Mirage 2000-D de la base de Nancy, deux Mirage 2000-5 de la base de Luxeuil, deux Alpha Jet venus de Cazaux et deux Rafale de Saint-Dizier.
Au bout du compte, quatre appareils ont été détruits et deux Rafale endommagés. « A côté de ça, nous sommes des soldats, notre vie de soldats continue, a rappelé le chef d'état-major. Depuis l’accident, plus de vingt missions de combat ont été effectuées par des appareils français, tant au dessus de l’Irak qu’au Sahel. »
Il a ajouté que la France participait aux deux enquêtes ouvertes en Espagne, l’enquête judiciaire, à laquelle travaillent des gendarmes, et à l’enquête technique, à laquelle participent des membres du bureau d’enquête accident défense. « Ce sera une enquête multinationale, les gens ont commencé à travailler ensemble », a précisé le général, selon qui « nous avons des garanties de transparence ».
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