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J'ignore par où commencer puisque votre commentaire mélange plusieurs choses. D'une part, il faut évaluer le contexte géopolitique avant de prendre une décision militaire quelconque. Les États-Unis ne peuvent pas intervenir pour sauver le Tibet parce que ça déclencherait probablement une Troisième Guerre mondiale. Je pense que l'utilitarisme de Bentham joue un rôle important dans la prise de décisions de nos décideurs politiques en lien avec une intervention militaire : l'intervention risque-t-elle d'empirer la situation actuelle? Il faut peser les pour et les contre. S'il y a trop de contre, il ne faut pas intervenir. Donc, il ne faut pas adopter une réponse similaire chaque fois qu'un pays fait usage d'armes prohibées par la Convention de Genève parce que la réalité géopolitique limite le champ d'intervention des grandes puissances.CITATION (Hermod,Vendredi 30 Août 2013 22h47) Quelque chose me gêne dans l'argumentaire "ils ont utilisé des armes chimiques, donc on intervient" : donc, quand le Tibet est en train d'être rayé de la carte, non seulement en terme de population (remplacement progressif par les Tibétains de Chinois sur leur territoire) mais également en terme de culture pure et simple, quand les Russes, il y a quelques années, mènent une politique d'élimination d'une partie des Tchètchènes, maison par maison, là il n'y a pas de ligne rouge franchie ?
Quid des camps, de l'élimination et de la torture de dizaines de milliers d'êtres humains en Corée du Nord ? Pourquoi ne pas intervenir en Colombie pour mettre un terme à la guerre civile qui dure depuis plusieurs décennies ?
Soyons clairs : ce sont des questions provocatrices, je ne prône aucune intervention. Ce que je souhaite que l'on me dise, c'est quel est le curseur à partir duquel on intervient à l'étranger : usage de l'arme chimique, tentative de génocide, camps de la mort ? Et qui en décide ?
L'aspect gênant est, à mon humble avis, le suivant : on ne peut raisonner uniquement sur l'émotion que suscite une situation. Il faut avoir du recul, et une vision plus froide des choses.
Obama vient de déclarer que l'utilisation d'armes chimiques par la Syrie mettait en jeu la sécurité nationale des Etats-Unis : c'est une vaste fumisterie, la Syrie ne peut mettre en cause la sécurité nationale des Etats-Unis, il faut être sérieux.
Pour l'exemple cité sur la Corée du Nord par exemple, le simple fait que Pyongyang possède l'arme atomique et que les Nord-Coréens sont aussi kamikazes que les Japonais à l'époque de la Deuxième Guerre mondiale est une raison suffisante pour ne pas intervenir même si les violations des droits de l'homme sont pires qu'en Syrie (plus de gens meurent de faim en Corée du Nord que de gens qui meurent fusillés présentement en Syrie). Il y a, bien sûr, toute la question de la Chine qui réagit avec agressivité chaque fois que les Américains déploient des porte-avions ou des navires de guerre dans la mer Jaune, considérée comme une zone d'exclusivité économique spéciale par Pékin. Il y a aussi la question de l'artillerie nord-coréenne pointant sur la capitale économique sud-coréenne, Séoul. En cas de guerre, les répercussions économiques seraient catastrophiques. Donc, on voit bien que dans une analyse comparée des deux cas, les Américains ne peuvent pas utiliser la même approche de la ligne rouge en Corée du Nord qu'en Syrie.
Tu peux voir que les choses sont, au contraire, analysées très froidement. Il y a des calculs stratégiques qui sont réalisés par les conseillers à la sécurité nationale du Président Obama et ses autres conseillers spéciaux en matière de politique étrangère. Cela prend en compte le contexte géopolitique, la situation sur le terrain avec un rapport détaillé des services de renseignement et les conséquences des différentes actions à la disposition du président. L'émotion suscitée dans les médias concernant les massacres en Syrie est bien réelle, mais l'intervention militaire américaine imminente en Syrie n'est pas liée uniquement à des considérations morales ou émotionnelles.
Pour ce qui est de l'utilisation des armes chimiques en Syrie, je pense que tout analyste au fait de la situation au Proche-Orient te dira que ce n'est pas dans l'intérêt de quiconque sauf, peut-être Al Qaïda, que des armes chimiques soient utilisées en Syrie par des gens inconnus et qu'il y ait une prolifération de ce type d'armes après que des groupes à éviter aient mis la main sur ce type d'arme. La destruction des installations chimiques devient donc une priorité pour empêcher toute prolifération dans les milieux terroristes. La sécurité nationale des États-Unis et de leurs alliés serait donc réellement mise en danger.